D’aucuns tiennent l’absence de matières premières comme preuve du désintéressement des puissances. Les pauvres ont des enfants, on en prélève quelques uns. Et l’assistance, c’est bon pour l’image, pour surveiller les secours concurrents, pour redorer le blason des Etats. De bonnes âmes jugent nécessaire de placer Haïti sous tutelle et bénissent la prise de contrôle de l’aéroport par l’armée étasunienne. L’ONU, c’est trop long, trop compliqué. Et puis, sont déclarés pillards les pauvres bougres qui retirent des décombres de quoi boire et manger. Ils sont menottés manu militari devant des appareils photos et caméras ; on nous montre des casques bleus basanés en action pour que nous ne cédions pas à l’antiaméricanisme. Les Etats vont rivaliser en sociétés de conseils et autres entreprises de BTP pour préconiser des constructions futures aux normes antisismiques. Rentabiliser la catastrophe. La Confédération suisse veut rendre le trésor séquestré de Duvalier mais à qui ? Jusqu’à présent, les dirigeants donnaient leur numéro privé de compte en banque. Rendons justice au passage aux ONG désintéressées, aux médecins, infirmiers, secouristes, enseignants et autres qui sont sur place depuis longtemps ou se sont déplacés dans l’urgence.
On redécouvre l’Amérique puisque Christophe Colomb débarqua là, baptisant l’île Hispaniola1. Les Français prirent pied en 1697. Michelet l’appela « La France noire ». De 1794 à 1802, les esclaves noirs menés par Toussaient Louverture sont maîtres de l’île. Par le traité de Bâle, l’Espagne cède sa partie de l’île à la France en 1795. En 1804, les habitants chassent les troupes napoléoniennes. De 1825 à 1947 Haïti a payé 21 milliards de dollars de rançon à la France pour "compenser" les pertes des esclavagistes français après l'Indépendance de l'Ile, rançon de 150 millions de francs or royalement exigée par le roi Charles X. Une oligarchie noire et mulâtre prendra la place des anciens colons, sans plus se soucier du peuple. Le politologue haïtien Robert Fatton a parlé de « république prédatrice ». Jean-Bertrand Aristide s’est plié au système et y a plié les Haïtiens, à peine remis des violences du régime Duvalier. Les clans n’ont jamais voulu d’un Etat véritable.
Dans l’indifférence générale, un comité de citoyens avait proposé l’attribution du prix Nobel 2003 de la paix à Gérard Pierre-Charles (1935-2004), intellectuel et militant politique haïtien, cofondateur de l’Organisation du Peuple en Lutte Pacifique (OPLP), promoteur d’un modèle de développement ad hoc. Il s’agissait de fêter dignement les 200 ans d’indépendance. Las ! Le développement n’est plus à l’ordre du jour. « La lutte contre la pauvreté » lui tient lieu de produit de substitution2. La charité (inefficace, à en juger par l’accroissement généralisé du nombre d’affamés) remplace l’ambition de justice3. Dans le classement du PNUD, Haïti a l’indice de développement humain 0,532 en 2009 (échelle de 1 à 10), ce qui la place à la 149ème place sur 182, et la dernière de la région Amérique latine/ Caraïbes. Une caste s’approprie les richesses de l’île. On a privatisé à tour de bras. L’écosystème est détruit.
Les insulaires de Tikopia (Archipel mélanésien des îles Salomon, 5 km2 et 1200 habitants) subirent un violent cyclone en décembre 2002. On ne dénombra aucun mort. Les habitants se réfugièrent dans les grottes du volcan. Ils refusèrent sagement l’introduction de nouvelles technologies, sachant d’expériences que les cyclones dévastaient régulièrement leurs habitations. Ils reconstruisirent à l’identiques leurs maisons végétales et réintroduisirent même des techniques ancestrales (dont la pirogue à voile) interdites (avec le Tatouage) par les missionnaires. Les habitants refusent d’introduire l’argent dans leur société. Tikopia n’est pas Utopia. N’empêche qu’il vaut souvent mieux avoir de petits voisins pauvres au loin que de gros riches proches.
Prédation, cynisme, croyances, maldéveloppement, répulsion envers l’Etat, corruption ; nihil novi sub sole. Mais, sous la loupe haïtienne, c’est franchement brûlant, énorme.
Gabriel Galice – 5 février 2010
1 Je tire plusieurs informations de numéros de la revue Alternatives économiques.
2 Lire Francine Mestrum, « Mondialisation et pauvreté - De l’utilité de la pauvreté dans le nouvel ordre mondial», L’Harmattan, 2002.
3 Pour renouer avec l’ambition du développement repensé, cf. Christian Comeliau, L’économie contre le développement ? – Pour une éthique du développement mondialisé, L’Harmattan, 2009.
Histoire de peuples et d'habitants d'un pays qui, comme le Libéria, la Sierra Leone et d'autres contrées du monde si déshéritées, durent avec leurs déportés et esclaves tenter de vivre et la cherche toujours la survivance, actualités toujours : dsk fmi forces de frappes et de matraques jusque-s-à quand, extraits seulement avec rajout du lien source qui, parmi d'autres, informe à propos de la souricière monétaire cauchemardesque
« Communiqué de presse 30 janvier Le CADTM dénonce le prêt du FMI et exige que les créanciers versent des réparations pour Haïti. http://www.cadtm.org/Le-CADTM-denonce-le-pret-du-FMI-et
Le 27 janvier dernier, le FMI se félicitait de sa réactivité face au désastre humanitaire en Haïti en décidant « une aide d’urgence » de 102 millions de dollars |1|. Pour le CADTM, une telle annonce est scandaleuse : ce que le FMI ose qualifier d’ « aide », en raison d’un délai de grâce de 5 ans et demi et de l’absence d’intérêts, constitue rien de moins qu’un prêt dont le capital devra être remboursé. Loin d’aider Haïti à se reconstruire, ce prêt va au contraire paupériser davantage le peuple haïtien en augmentant son endettement. Et comme si le peuple haïtien n’avait pas assez souffert, le FMI impose en contrepartie de ce prêt, inclus dans un programme d’ajustement structurel, l’application d’une série de mesures anti-sociales telles que l’augmentation du prix de l’électricité ou encore le gel des salaires dans le fonction publique ! Dans le même temps, son directeur général Dominique Strauss-Kahn appelle, sans aucune gêne, à la mise en place d’un plan Marshall pour Haïti, qui comprendrait l’annulation de sa dette. Le CADTM dénonce cet…….C’est pourquoi le CADTM exige un plan pour Haïti radicalement différent de celui proposé par Strauss Kahn et le FMI. Ce plan ne doit pas comprendre les annulations de dettes mais seulement des dons sans contrepartie octroyés au titre des réparations pour tous les dommages subis….Le CADTM soutient également l’idée d’une action en justice contre le FMI, qui selon ses statuts ne peut effectuer de dons, afin de le contraindre à réparer les préjudices causés en Haïti et dans l’ensemble des pays du Sud. A côté de ces réparations, il est indispensable :
* d’annuler totalement et sans conditions la dette haïtienne, comme l’a fait le Venezuela
** de rétrocéder toutes les sommes perçues au titre du remboursement de la dette car la dette initiale, dite dette de l’indépendance, n’a aucune valeur légale, et est donc nulle en droit
*** de restituer à la population tous les avoirs détournés par les dirigeants haïtiens et leur entourage, sur base de la Convention de l’ONU contre la corruption. Notes |1| Communiqué du FMI du 27 janvier 2010, « Le Conseil d’administration du FMI approuve une aide d’urgence de 102 millions de dollars EU en faveur d’Haïti », www.imf.org/external/french/np/sec/pr/2010/pr1017f.htm