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Monsieur le Président, appelez de Villepin !

Par Gabriel Galice • Actualités • Lundi 23/11/2015 • 0 commentaires  • Lu 1514 fois • Version imprimable


Monsieur le Président de la République,

Sept jours après les attentats du 13 novembre à Paris, les dramatiques circonstances de l’heure me poussent à vous écrire. Le souci patriotique m’anime, aiguisé par la priorité accordée à la diplomatie. Je vous ai écouté attentivement, votre charge vous accable et vous rehausse.

Peu familier des arcanes judiciaires, militaires et policiers, je me bornerai à pointer deux catégories de préoccupations, assorties de suggestions.

Le premier souci est la situation économique et sociale. Vous avez parfaitement raison : le pacte de sécurité prévaut sur le pacte de stabilité. Il convient d’en tirer toutes les conséquences. Vous sollicitez à bon droit la mise en œuvre, au bénéfice de la France, de l’article 42.7 du Traité de Lisbonne pour impliquer nos partenaires de l’Union européenne. Mais le pacte de stabilité restera une contrainte forte dont la France ne pourra que très marginalement s’affranchir si les règles de jeu ne sont pas revues de fond en comble. Avec Paul Krugman et quelques autres (je choisis un économiste étranger pour me tenir à distance de la scène politique française), je doute que votre politique de l’offre soit la bonne. Je doute que les politiques financière, budgétaire, monétaire, intimement liées, soient viables sans conséquences sociales plus dramatiques encore qu’elles le sont actuellement, dans les banlieues et dans l’ensemble du pays.

Ma seconde remarque, Monsieur le Président de la République, vise la réorientation de la politique étrangère. Elle porte sur son ampleur et sa direction. Sera-ce un infléchissement ou un changement de cap ? Le prétendu Etat islamique prend sa source en Irak et en Libye. Les Etats-Unis sont les principaux responsables de la destruction de l’Etat et de la société irakiens, le Royaume-Uni et la France ont conduit le changement de régime en Libye, outrepassant le mandat du Conseil de sécurité de protéger la population. La France a continué en Syrie sa politique d’ingérence supposément humanitaire. Elle a clandestinement armé des opposants trop rapidement, désinvoltement selon moi, tenus pour modérés (dont le Front Al-Nosra, filiale d’Al Qaïda en Syrie), enfreignant la légalité internationale et l’embargo décidé par l’Union européenne. La défense des droits de l’homme s’est avérée bien sélective. Bref, cette politique occidentale du chaos est une dramatique impasse qui débouche sur les attentats de Tunis, de Sousse, d’Ankara, du Sinaï, de Beyrouth, de Paris. La destruction des Etats, au prétexte du remplacement de leur chef, nourrit partout les bandes de trafiquants, les armées de fanatiques et les commandos de tueurs. Le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius a conduit cette politique avec une opiniâtreté patente. Sa posture envers Moscou, Téhéran, Damas ou Tel Aviv n’a favorisé ni l’indépendance de la France ni la cause de la paix. Errare humanum est, perseverare diabolicum. Il faut donc à la fois changer de politique étrangère et remplacer le ministre. Son état de santé le conduirait, dit-on, à une démission programmée au lendemain de la COP 21. Des noms circulent pour sa succession, parmi lesquels ceux d’Hubert Védrine, d’Elisabeth Guigou, de Ségolène Royal. Sans mésestimer les talents des personnalités citées, permettez-moi, Monsieur le Président de la République, de vous suggérer le nom de Dominique de Villepin. Plutôt que d’en appeler à une invraisemblable « union sacrée », plus compromise encore par les proches échéances électorales, mieux vaudrait poser un acte fort, symboliquement et pratiquement. Vous vous placeriez de la sorte au-dessus de la mêlée. Vous associeriez une figure de droite estimée au gouvernement de la France. Vous afficheriez le visage de la France que le monde entier aime et respecte. Vous renforceriez une dimension ONUsienne, préférable à la posture OTANienne. Vous donneriez à une personnalité déterminée les moyens de la réorganisation qui, manifestement, s’impose au Quai d’Orsay. Dans la « drôle de guerre » que vous entendez conduire contre les terroristes (plutôt que contre le terrorisme), il vous faut, sur le front diplomatique, un homme d’exception, reconnu.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma très haute considération.

 

Gabriel Galice, ancien Conseiller régional de la Région Rhône-Alpes (membre de la commission des affaires économiques et internationales), auteur du livre Du Peuple-nation – essai sur le milieu national de peuples d’Europe.


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