La population islandaise compte 320 000 habitants. Largement externalisée, par choix et par nécessité, donc dépendante des aléas du monde, l’économie islandaise a subi de plein fouet la crise financière. Aux conséquences ordinaires s’ajoute le fiasco de la banque en ligne Icesave. Les gouvernements britanniques et néerlandais ont secouru leurs 300 000 ressortissants ayant perdu de l’argent dans le naufrage d’Icesave. Ils se retournent vers L’Etat islandais pour solliciter le remboursement de près de quatre milliards d’euros. Le parlement intègre (à 33 voix contre 30) cette dette dans le plan de redressement soumis au FMI, qui doit secourir l’Islande. L’Islande a déjà nationalisé les trois banques en faillite. La mobilisation populaire fait pression (60 000 pétitions à l’appui) sur le Président pour qu’il ne ratifie pas la loi votée. Le Président recourt au référendum. La « communauté financière internationale » s’en émeut. Grosso modo, la somme en cause représente une dette de 12 500 €/habitant, enfants inclus, soit quelque 20'000 € par contribuable, avant correction de la répartition entre personnes morales et physiques.
A y regarder de plus près, on observe que c’est moins le principe que les conditions du remboursement (dont le taux d’intérêt de 5,5% sur 15 ans) qui douche glacialement la population islandaise. De leur côté, les gouvernements britanniques et néerlandais menacent de bloquer l’adhésion en cours de l’Islande à L’Union Européenne.
L’affaire islandaise fournit une loupe aux errements contemporains. Naguère, l’Etat était garant en dernier ressort d’une faillite d’une personne morale. Désormais, il se voit invité à dédommager des personnes physiques et des institutions alors que les mêmes partisans du dédommagement ne cessent de discréditer et de mutiler l’Etat. L’Etat islandais est faible à la fois par la modestie de sa population et par le discrédit général frappant le Totem des sociétés contemporaines. Réduire à peu de choses
On pourrait imaginer des fonds de garanties interbancaires qui provisionneraient des pertes. Mais ce serait réduire les profits immédiats. Barack Obama va plus loin par l’intention de taxer les mouvements spéculatifs et de dissocier banques d’investissements et banques d’affaires. Ce serait revenir à l’époque antérieure à la dérégulation-désintermédiation inaugurant la révolution néo-libérale.
La fronde populaire permettra sans doute au gouvernement de renégocier les conditions exorbitantes, comme le fait remarquer The Economist du 9 janvier.
L’appréciation de l’hebdomadaire suisse d’inspiration démocrate-chrétienne, Horizons et débats, « hebdomadaire favorisant la pensée indépendante, l’éthique, et la responsabilité pour le respect et la promotion du droit international, du droit humanitaire et des droits humains », vaut pour son mérite et pour sa limite. Sous le titre « L’Islande ou le caractère démoniaque de l’argent », sous-titré « Comment l’un des pays les plus riches du monde s’est effondré d’un jour à l’autre et les leçon à en tirer », l’article de Bruno Bandulet exprime le point de vue d’un analyste financier assez typique du « capitalisme rhénan », méfiant vis-à-vis du « capitalisme néo-américain » (typologie de Michel Albert dans Capitalisme contre capitalisme). A fortiori en se fondant sur le livre Le cas de l’Islande – Comment les spéculateurs internationaux ont conduit un pays au bord de la faillite d’Etat, écrit par Ásger Jónsson, l’économiste en chef de
Bref, le mérite du récit de Jónsson, évoqué par Bandulet, consiste à montrer les pratiques concrètes des marchands derrière le rideau de fumée du marché. Le peuple islandais a joué avec le feu. Peuple cultivé, avide de lecture et de culture, il aurait sans doute intérêt, pour l’avenir, à davantage compter sur ses propres forces qu’à jouer à une loterie financière qui accable de bien plus puissants que lui.
Gabriel Galice
Le FMI au secours de l'Islande à la population majoritairement "cultivée avide de culture et de lecture", comme il va au secours de tant de pays africains aux polulations soit-disant plutôt "primitives et peu malines", voilà qui ne devrait pas laisser indifférent. Ca rappelle l'idée du jour du jugement final où on est tous à poil, égaux devant le créateur. Pour le coup le créateur en question serait plutôt le diable, et ses diablotins banquiers spéculateurs et autres cupides de tout poil. Plus le petit diable qui est dans chacun de nous autres, et qui nous dit tous les matins devant la glace en nous raseant:"encore un petit sou!".