A l’instar de Margaret Thatcher redorant son blason par la guerre des Malouines contre les généraux argentins, ou de George W Bush s’affirmant par les armes de l’Empire, Nicolas Sarkozy combat d’abord son impopularité. Sa belliqueuse entreprise sera-t-elle autant couronnée de succès que celle de ses mentors ? Dans Le Courrier, daté du 7 avril 2011, Benito Perez intitule son éditorial « La guerre à tout faire » http://www.lecourrier.ch/la_guerre_a_tout_faire . Il écrit : « La guerre est une drogue à forte accoutumance pour Nicolas Sarkozy. (…) Personne ne croit au désintérêt de Paris dans ces opérations militaires (en Libye, en Côte d’Ivoire), pas même les bruyants supporters de la « guerre humanitaire ». (…) On voit vite quel type de relations internationales nous préparent ces apprentis sorciers. Un monde où grandes et moyennes puissances peuvent user de la force armée au gré de leurs intérêts nationaux voire électoraux ! – et des justifications offertes par l’actualité. »
Dominique de Villepin se montre plus raisonnable que le va-t-en-guerre Président français. Dans l’entretien au Berner Zeitung du 4 avril http://www.bernerzeitung.ch/ausland/europa/Die-Welt-braucht-Frankreich-/story/24428738 intitulé « Die Welt braucht Frankreich » (Le monde a besoin de la France), l’ancien premier ministre trace nettement la limite entre responsabilité de protéger et ingérence, condamnant la tentative de renversement du régime de Kadhafi.
La position de Jean-Pierre Chevènement témoigne d’une semblable modération sur son blog http://www.chevenement.fr/La-video-de-l-intervention-de-Jean-Pierre-Chevenement-au-Senat-sur-la-Libye_a1102.html Comme Dominique de Villepin, il précise la limite entre la responsabilité de protéger, instaurée par le Document final du Sommet mondial des Nations unies à New York en 2005, décrite en ses paragraphes 138 et 139, et mise en oeuvre par la résolution 1973, d’une part , et le droit ou devoir d’ingérence dont est si friand BHL, d’autre part. Libre aux naïfs de croire à des histoires de bons et de méchants. Combien de citoyens informés savent que le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye sont depuis des lustres soutenus par l’Union européenne et ses Etats membres pour contenir les migrants remontant d’Afrique noire ? A défaut d’avoir transporté (ou laissé) des richesses au Sud, des populations du Sud se déplacent vers les ressources des pays du Nord.
En Côte d’Ivoire, les exactions (viols, tueries, à Duékoué notamment…) imputées aux troupes d’Alassane Ouattara, commandées par Guillaume Soro, seigneur de guerre réputé et Premier ministre, et armées par la France, sont pudiquement passées sous silence par nos bien-pensants, tout comme restent impunies les atrocités perpétrées par les troupes Kosovars (lire à ce sujet le témoignage de Carla Del Ponte dans son livre, ou celui de Dick Marty. Dans Le Temps du 4 avril, Angélique Mounier-Kuhn conclue ainsi son éditorial : «Devenus chef de guerre, il (Ouattara) n’a eu de cesse, ces dernières heures, de contester les crimes imputés à ses hommes - les tient-il vraiment ? - alors qu’il aurait dû immédiatement s’engager à diligenter une enquête. Ce faisant, Outtara dilapide son capital le plus précieux : sa légitimité. Sous le regard du monde entier. » Les soldats français sous uniforme ONU, ce n’est certes pas la France mais les intérêts français n’en sont pas moins assurés, la Franceàfric rejoignant la Françafrique.
Gabriel Galice – le 7 avril 2011
Merci M. Gabriel Galice pour cet article équilibré qui rétablit l'image d'indépendance d'esprit de « La Sociale » un peu malmenée ces derniers temps. Toute cette guerre de Libye était prévue avec la propagande qui allait avec depuis longtemps. Un grand journal populaire anglais ne prenant même pas la peine de le cacher à ses lecteurs :
http://www.mirror.co.uk/news/top-stories/2011/03/20/crack-sas-troops-hunt-gaddafi-weapons-inside-libya-115875-23002207/
Je traduis le début de l'article :
Le Sunday Mirror ( du 20 mars 2011 ) peut révéler aujourd'hui que des centaines de soldats britanniques SAS ont opéré avec les groupes rebelles à l'intérieur de la Libye depuis trois semaines.
Deux unités de forces spéciales, surnommées équipes « Smash » pour leur capacité destructrice, font la chasse aux systèmes de missiles sol-air à long portée du colonel Kadhafi, qui pourraient lancer des attaques contre les avions ou les avions de ligne commerciaux.
Fin de traduction
Donc, aux alentours du 1er mars, des commandos SAS détruisent des installations de missiles sol-air en Libye alors que la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies n'est adoptée que le 17 mars.
Dans le New-York Times du 30 mars 2011 : http://www.nytimes.com/2011/03/31/world/africa/31intel.html?_r=1&hp
On peut lire :
While President Obama has insisted that no American military ground troops participate in the Libyan campaign, small groups of C.I.A. operatives have been working in Libya for several weeks as part of a shadow force of Westerners that the Obama administration hopes can help bleed Colonel Qaddafi’s military, the officials said.
Ce que je traduis par :
Pendant que le Président Obama a insisté sur le fait qu'aucune troupe américaine ne participe aux combats au sol en Libye, des portes-paroles officiels ont déclaré : « Faisant partie d'un dispositif occidental, des petits groupes de la CIA opèrent clandestinement depuis plusieurs semaines en Libye avec l'espoir pour l'administration Obama de détruire l'infrastructure militaire de Khadafi.»
Attention, ne faites pas dire que je pense que Khadafi est, ou était, le mieux pour la Libye, je dis simplement qu'instruit par la Guerre en Irak, je pense que c'était aux Libyens d'en décider et non aux dirigeants dont on connait par ailleurs le respect pour la démocratie.