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Lettre au nouveau secrétaire général de la confédération FORCE OUVRIERE

Par Denis Langlet • Actualités • Lundi 03/12/2018 • 0 commentaires  • Lu 2115 fois • Version imprimable


Nous publions ci dessous la lettre que vient d'envoyer Denis Langlet, syndiqué FO, ingénieur retraité de la métallurgie, Secrétaire de l'Union Locale Force Ouvrière de Trappes et environs dans les Yvelines, à Yves VEYRIER, Secrétaire général de la confédération FORCE OUVRIERE, et qu'il adresse en copie à Frédéric Homez, secrétaire de la Fédération des Métaux, Dominique Ruffié, secrétaire général de l’UD FO des Yvelines et à tous ses amis dont nous sommes. Dans la situation actuelle, cette lettre met l'accent sur la question essentielle de la place et de la position des organisations syndicales dans le mouvement actuelle qui agite le pays. Lettre à lire et à diffuser le plus largement possible...



​Cher camarade,


Il n'est pas dans nos traditions, ni dans le respect réciproque qui doit présider nos relations de « sauter » sur le secrétaire général nouvellement élu. Elu le 22 novembre dernier, il y a donc 7 jours maintenant, nous pourrions t'accorder un délai de prise de fonction, personne n’aurait à y redire d'autant que ton élection succède à des moments graves, sérieux et difficiles pour notre confédération.
Personne sauf nous, toi, moi, et tous nos camarades syndiqués.

Les anciens, et nous en sommes, le savent, les moins de 60 ans l'ont appris et les jeunes le portent ; je veux parler de nos idéaux de justice et de fraternité, de nos aspirations à construire ensemble un avenir, notre futur, sur le socle de l'égalité des droits, pour la Paix tout de suite et partout, condition indispensable à la sécurité de chacune, de chacun et de toutes les familles.
Ce sont ces idéaux et ces aspirations qui sont la source de notre adhésion syndicale, et dont le syndicalisme confédéré, dès sa naissance, est porteur.

Quel que soit notre parcours personnel, notre histoire et la date de notre engagement c'est à l'aune de ces valeurs et de ces idéaux que nous jaugeons et jugeons de la qualité de notre engagement personnel, creuset de l'action collective.

Aujourd'hui, dans ce pays, chacun sent, ressent une atmosphère de fin de quelque chose, pressent la venue de grands événements. La fierté regagnent les cœurs, les fronts se relèvent découvrant des regards décidés et graves, la prise de la parole par les taiseux génère la confiance en soi, nos idéaux raillés par les puissants sous le terme « utopies ce ne sont qu'utopies » et considérés comme hors d'atteinte, prennent la couleur du possible.

Nous sommes bien placés pour l'avoir vécu. Avec les vagues de licenciements massifs et de restructurations industrielles à partir des années 70, l'austérité salariale à partir du début des années 80, la précarisation et la perte de droits happés par la course à la marge, à la compétitivité des années 90, et depuis appliquée « sans état d'âme », la baisse des coûts avec son cortège d'injustices, la culpabilisation et la remise en cause de chacun jusqu'au burn-out et les suicides au travail, nos idéaux semblent s'éloigner et notre engagement apparaît lourd et vécu comme un témoignage nécessaire mais marqué par les reculs sociaux et affectant grandement nos rangs.

Au point que les rangs de notre génération se dégarnissent sans que les jeunes ne puissent, éparpillés, montrés du doigt, souvent non bénéficiaires des acquis que nous appelons à défendre, les remplacer. Pendant cette période, une conviction profonde s'est forgée dans la douleur et la contrainte, la priorité donnée à la finance et la réduction de toutes les activités humaines au seul chiffre de la rentabilité, telle est la source du basculement progressif de notre société vers l'inconnu et la déshumanisation.

Comme ses prédécesseurs, le gouvernement actuel de monsieur Macron oppose systématiquement une fin de non-recevoir à la revendication de l'augmentation du pouvoir d'achat portée en ce moment par le mouvement des gilets jaunes.

Appuyée par l'immense majorité du pays, cette demande est, tu le sais, réalisable tout de suite.
Elle rejoint d'ailleurs la nôtre que par expérience nous formulons par « demande d'augmentation générale des salaires pour tous».

Comme le dit l’un d’entre eux ce soir à la télé à une député du mouvement présidentiel : «vos mesures ont été les gouttes qui ont fait débordé le vase, mais le vase était déjà plein par les mêmes mesures prises par vos prédécesseurs, c’est pour ça que nous ne voulons pas de simples discussions mais que soit abordée la réorganisation nécessaire de note société ».

Aujourd'hui, répétons-le, ou un coup d'arrêt est porté aux exigences destructrices de ces gigantesques masses de capitaux appelées marché financier, ou leur puissance combinée à leur extériorité à tout ce qui est humain risque d’entraîner notre planète et ses habitants dans la spirale de la spéculation destructrice.

Dès lors que la décision sera prise de cesser d'être gouvernés par des riches pour des riches, les moyens financiers seront là.
Par exemple, l’arrêt du remboursement des intérêts de la dette imposée par les banques et la BCE dégagerait plus de 140 milliards sur l'année et l’arrêt des exonérations fiscales et sociales pour les sociétés supra nationales économiserait 100 milliards en plus.

Il est clair, par la naissance du mouvement des gilets jaunes, que des milliers de jeunes, d'hommes et de femmes participent eux-mêmes à une lutte active. Cela ne peut que nous satisfaire.

Nous apprécions aussi l'obstination et l’intelligence collective dont ils font preuve depuis le début, cherchant le dialogue pacifique avec tous les autres citoyens, et indéniablement, faisant la démonstration de la nécessité rendue possible de réorganisation de la société avec la satisfaction des revendications.

Certains disent que les gilets jaunes redoutent les syndicats, c'est faux. Ce qu'ils redoutent, ce sont les discussions secrètes, les fausses négociations à huis clos, les pseudos délégués proclamés et l’expulsion des principaux concernés de la direction de cette lutte.
Comme nous, ils savent que cela est le paravent des trahisons. Comme nous, ils savent collectivement que seule la démocratie totale permettra le succès.

Reconnaissons que leur audace pose directement et publiquement une question jusqu'à ce jour murmurée et en sourdine dans la société, à savoir que rien de durable ni de pérenne ne peut être obtenu avec la domination de la finance privée sur toute la société, c'est pourquoi le retrait de la monnaie, de sa création, de sa gestion et de sa circulation des mains des banques et du privé va devenir urgente.

Persuadé que ton expérience te permettra de trouver les formes, dans ta nouvelle fonction, assurant à notre confédération la place qui doit être la sienne en s’engageant dès aujourd’hui et en participant dans les manifestations de samedi ainsi que sur les ronds-points aux côtés des gilets jaunes.

Je te prie de recevoir l’expression de mes convictions profondes et de mon attachement aux principes fondateurs du syndicalisme confédéré. 

Denis Langlet,
syndiqué FO, ingénieur retraité de la métallurgie,
Secrétaire de l'Union Locale Force Ouvrière de Trappes et environs dans les Yvelines



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