Avant de passer à l’aspect directement politique de la chose, il convient d’abord d’être prudent : que les mensonges de son accusatrice rendent impossibles des poursuites contre DSK ne signifie nullement que DSK est innocent. Le scénario d’une agression sexuelle n’est pas abandonné par la justice américaine car le fait que son accusatrice ait l’habitude de prendre des libertés avec la vérité factuelle ne dit pas que là elle ait menti (logiquement une telle inférence est impossible). Qu’elle ait voulu tirer parti d’une relation tarifée qui a mal tourné (version souvent rapportée dans la presse des USA) dont ensuite la victime présumée aurait voulu tirer parti, ce n’est pas impossible du tout. Une chose est certaine : il y a bien relation sexuelle entre l’ex-directeur du FMI et son accusatrice. Et c’est là qu’intervient l’interrogation : soit il y a bien eu agression sexuelle et alors l’auteur de l’agression est inexcusable (violer une immigrée qui a menti pour obtenir ses papiers n’est pas plus justifiable que violer une employée modèle !). Soit DSK est tombé dans un piège et alors, comme il devait se douter que le moindre dérapage pourrait être exploité, vu sa position, cet homme est un crétin de s’être laissé ainsi mener par le bout de son pénis… Se laisser mener par le bout de son pénis n’est évidemment pas un crime, mais cela laisse plus perplexe quand il s’agit de quelqu’un qui se veut un homme d’État. Dans les deux cas, cette affaire aurait dû clore l’épisode DSK pour le PS.
Que l’affaire DSK, qui rebondit avec la plainte de Tristane Banon, soit un complot monté par la droite est plutôt ridicule. D’abord, la droite profondément déchirée, ne semble guère en mesure de monter des complots sophistiqués, unissant la police de New York et le groupe Accor. Et encore moins de monter des complots pour sauver Sarkozy auquel plus personne n’obéit ainsi que l’a encore montré le dernier remaniement ministériel qui a vu M. Baroin se nommer lui-même ministre des finances… Et surtout, si l’actuel président avait voulu vraiment piéger DSK, il aurait laissé courir les choses pour mieux le faire tomber sur une scandale bien glauque en début de campagne présidentielle, après que les socialistes l’aient désigné comme leur représentant.
Toutes ces spéculations servent cependant d’écran de fumée pour masquer la réalité politique : un instant désarçonnées, les éminences socialistes se sont remises à danser la danse du ventre devant l’ex-directeur du FMI. Et, de manière réaliste, certains semblent avoir fait leur deuil d’une candidature Strauss-Kahn, ils veulent faire de leur héros le mentor, l’inspirateur et l’âme de la campagne socialiste, réduisant celle ou celui qui sera investi au rôle de femme ou d’homme de paille de la ligne FMI. Le ticket Aubry-DSK que certains concoctent est une des formes possibles de cette stratégie.
Tout cela a un sens politique : DSK est l’inspirateur du plan de dépeçage de la Grèce. Papandréou est « socialiste », comme Zapatero en Espagne et Socrates (qui vient de céder sa place à la droite) au Portugal. En multipliant leurs déclarations d’amour pour DSK, les socialistes français disent tout simplement : « nos programmes, résolutions de congrès et autres envolées sociales (et même socialistes) ne sont que des attrape-nigauds ; notre vrai programme, c’est la gouvernance financière mondiale et européenne et si besoin si nous ferons comme Papandréou. »
Comment mobiliser la gauche sur une telle ligne ? C’est évidemment impossible. Le PS s’interdit de regagner l’électorat ouvrier repassé au FN ; il favorise la dispersion des voix à gauche, légitime la candidature Front de Gauche de Mélenchon et entretient le dégoût pour un jeu politique si glauque. Si la pusillanimité des dirigeants de la rue Solferino, leur intégration à la classe capitaliste transnationale l’emportent définitivement dans les rangs du PS, il ne faudra pas s’étonner de récolter les fruits gâtés d’une telle politique.
Les temps pourraient être comiques si la déliquescence ne concernait que la représentation politique. Entre un président Fouquet’s- casse toi pov’con , un challenger guidé non seulement par son pénis mais par les bourses, et un troisième qui se flatte d’égaler Marchais, n’en jetez plus la cour est pleine. Vous dénoncez avec raison le culte du dieu Pan dans un parti abusivement appelé socialiste.
En guise de contre, la niaiserie : parce que femme, noire et immigrée, le « bon » camp ne pouvait que se situer là…comme si une plainte pénale ne devait pas être rigoureusement instruite pour rechercher la vérité. Voyez l’ineffable C.Autain déclarant après coup que si la plaignante a menti ce serait un coup dur porté aux femmes !
Signe indubitable des temps.
Pendant ce temps, tout passe sans coup férir. Dernier en date l’allongement de la durée de cotisation pour la retraite : à la trappe les retraites ! A quoi le tour maintenant ?