Il n’y a pas eu de victoire éclair de la Russie, comme le promettait Poutine au début de 2022. Mais la Russie ne s’est pas effondrée, malgré les sanctions occidentales qui ne sont plus d’aucun effet, puisque la Russie continue de commercer avec le monde entier — excepté la majeure partie de l’Europe qui s’est tiré une balle dans le pied et achète maintenant à des prix exorbitants du gaz de schiste américain sous les applaudissements des Verts (de gris) de toute l’Europe.
On n’a évidemment aucune raison de soutenir la Russie qui est formellement l’agresseur, puisqu’elle a envahi (24 février 2022) un État souverain, l’Ukraine, quoi que l’on puisse penser du gouvernement de cet État. Mais on n’a pas beaucoup plus de raison de soutenir l’Ukraine dont le gouvernement, trahissant ses promesses électorales, a renoncé à appliquer les accords de Minsk et a tiré dans vergogne sur la population de l’est de l’Ukraine (19 février 2022), soupçonnée d’être complice des Russes. Les Ukrainiens dans cette affaire sont encouragés depuis le début par les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Pologne et plus ou moins timidement par les autres pays de l’UE.
Cette guerre, dont le coût essentiel est supporté par la population ukrainienne, n’oppose pas de braves démocrates souverainistes aux méchants Russes, mais constitue le terrain de manœuvres entre impérialismes et dans tous les cas de figure pourrait déboucher sur un démembrement de l’Ukraine. Car, outre les ambitions russes, il faut tenir compte des ambitions polonaises — certains officiels polonais évoquant la reconstruction de la république du Royaume de Pologne et du Grand-duché de Lituanie, qui incluait une bonne partie de l’actuelle Ukraine, sans parler des nombreuses minorités, notamment magyares, qui constituent l’Ukraine.
Aucun État ne peut s’ériger en gendarme mondial et personne n’a vocation à rétablir la justice là où elle a été bafouée. Les États-Unis se prétendent les gendarmes du monde, ont plus de 800 bases à l’étranger et sèment le désordre partout où ils le peuvent. La destruction de l’Irak par Bush en 2003 et la destruction de la Libye en collaboration avec la France de Sarkozy ont déjà causé des centaines de milliers et sans doute même des millions de morts. Les États-Unis ont mis sur pied Al-Qaida, puis Daesh, ils ont financé le terrorisme pour ensuite faire mine de le combattre. Les dirigeants et l’oligarchie de ce pays sont une plaie mondiale. Donc, nous n’avons pas à leur accorder le plus petit soutien en Ukraine. Et nous n’avons pas à mettre le plus petit doigt dans cette guerre dont les États-Unis ne supporteront pas les frais et dont ils usent déjà pour démanteler les économies européennes et briser sur ce vieux continent qu’ils méprisent profondément toute velléité d’autonomie par rapport à Washington.
Cette guerre n’est pas notre guerre. Six à sept millions d’Ukrainiens ont fui leur pays et se sont réfugiés pour une grosse part en Russie… et pour une part moindre en Pologne. Cette guerre n’est pas non plus la leur ! La France est dans une position à la fois ridicule et humiliante. Macron n’est pas convaincu que la guerre à outrance contre la Russie soit un juste combat, expliquant qu’on ne peut vouloir mettre la Russie à genoux et qu’il fallait le négocier — en gros l’inverse des déclarations de l’inénarrable Le Maire. Mais depuis longtemps Poutine sait que Macron ne pèse rien en Europe. La France va livrer le mois prochain 2000 obus de 155 mm, soit quelques heures de tirs… Cette guerre confirme l’affaissement politique radical de la France. Encore une raison pour considérer que cette guerre n’est pas notre guerre.
Que pouvons-nous faire ? À peu près rien. Réclamer la paix sans condition, l’arrêt des combats et, s’il y avait encore dans ce pays des journalistes dignes de ce nom, une information honnête sur ce qui se passe sur le front oriental. Et refuser que nos impôts soient utilisés pour ajouter du malheur au malheur.