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Chroniques italiennes

Par Denis Collin • Internationale • Vendredi 18/04/2008 • 0 commentaires  • Lu 1503 fois • Version imprimable


Dimanche 13 avril.

 

On vote en Italie. Le résultat sera peut-être plus serré qu’annoncé.  Berlusconi ne l’emportera peut-être pas avec la confortable avance que les sondages lui donnaient il y a encore peu de temps. Mais finalement tout cela n’a peut-être pas beaucoup d’importance. Bertinotti, président de la chambre sortante et principal dirigeant du PRC, dans une interview à Il Manifesto datée du 12 avril appelle à un vote pour « un nouveau printemps italien », en référence évidemment au printemps 1968. Il ne semble pourtant pas d’un optimisme excessif quant au résultat auquel « La Sinistra l’arcobaleno » (la gauche arc-en-ciel) peut prétendre.  Cette coalition du petit groupe de Fabio Musso (qui a refusé la fusion des DS avec la Marguerita démocrate-chrétienne dans le nouveau Pd dont Walter Veltroni est la figure de proue), de Rifondazione (Prc), des communistes d’Italie (CdI) et des Verts (I Verdi) est une coalition imposée par les circonstances et elle ressemble plus à un syndicat des petits partis de gauche pour sauver les meubles qu’à l’espérance d’une nouvelle force de gauche, même si Bertinotti voit dans la réouverture par l’Arcobaleno de l’ancien local du Pci dans le quartier romain du Testaccio un symbole fort. L’Italie fut à la Renaissance le laboratoire de la modernité européenne et c’est le chancelier de la République de Florence, Niccolò Machiavelli qui devait établir les fondements de la politique pour les siècles à vanir. Il est à craindre que l’évolution politique actuelle de l’Italie ne soit une fois encore le laboratoire de la politique européenne.

Plus rapidement qu’ailleurs, peut-être, nous assistons à la disparition du mouvement ouvrier européen. Fausto Bertinotti (Prc) situe assez clairement les enjeux : il s’agit de savoir si on va passer définitivement au modèle américain, c’est-à-dire à l’affrontement de deux grands partis que rien ne sépare vraiment et à la mise hors jeu du mouvement ouvrier. Ça ne veut évidemment pas dire la fin de la lutte des classes. Aux États-Unis la lutte des classes reste vive et parfois peut-être plus dure qu’en Europe, mais elle reste toujours cantonnée à une lutte « syndicale » pour déterminer la taille de la pitance concédée à la classe ouvrière. Jamais la classe ouvrière n’apparaît ou même ne fait semblant d’apparaître comme un facteur autonome ayant ses perspectives politiques propres. Les vieux partis socialistes et communistes n’étaient pas révolutionnaires ou seulement en paroles et encore de moins en moins souvent. Mais en s’appelant socialistes ou communistes, ils continuaient de revendiquer une filiation historique, même ténue. A Bade-Godesberg en 1959, la SPD a renoncé à la lutte des classes et au socialisme, mais est restée une organisation ouvrière. C’est peut-être en train de changer. Le New Labour de Blair a rompu beaucoup plus profondément avec la tradition du vieux Labour Party en se présentant comme un parti du centre, proche des partis libéraux de droite européens.  Mais il s’appelle encore « Labour ». Le PD de Veltroni est l’aboutissement de ce processus. Mené avec une main de fer et le sens de la manœuvre bureaucratique apprise dans l’appareil stalinien, l’opération de liquidation du Pci, commencée par Occhetto est allée jusqu’au bout. D’Alema, Fassini, Veltroni et autres canailles de la même farine font semblant de ne même plus se souvenir qu’ils ont été membres du Pci. Ils ont repris les locaux, l’appareil, l’argent, les combines, mais ils ne veulent plus entendre parler du mouvement ouvrier ni de la lutte des classes. Veltroni présente son parti comme celui des entrepreneurs et des créateurs… Un jour, cri du cœur, Veltroni laisse échapper un « je ne suis pas de gauche » ! Et pour cause, même la laïcité ne figure plus dans le programme du PD. Il est vrai qu’il ne faut pas effrayer les grenouilles de bénitier de la Marguerita dont l’ami Rutelli, calotin bon teint, qui ne veut pas entendre parler du PACS à l’italienne et pas beaucoup plus de l’IVG. Ce n’est pas grave : Bertrand Delanoë est venu apporter à Rutelli son chaleureux soutien pour l’élection à la mairie de Rome. Plus significatif encore : le PS italien – un petit groupe qui tente de se reconstruire après la calamiteuse ère Craxi – avait demandé à Veltroni de faire partie de la coalition avec le PD pour ces élections. Mais Veltroni qui venait d’accepter une offre du même genre de la part du groupe de Di Pietro – le juge le plus célèbre de l’opération « mani pulite » – a refusé la main tendue par le PS : le mot « socialiste » lui est devenu véritablement intolérable… Berlusconi ne s’y trompe pas. Il agonit d’injures ses adversaires, et sans crainte du ridicule les traite de « communistes » (Berlusconi est un pitre sinistre, « le clown aux dents blanches » dit une partie de la presse anglo-saxonne), mais il ajoute mezzo voce qu’il ne fera pas une politique économique différente de celle de Veltroni. Normal : la Cofindustria (la confédération patronale italienne) a fait savoir qu’elle préférait une victoire de Veltroni. Et la presse d’affaires britannique est exactement sur la même ligne.

Le résultat de tout cela commence à se dessiner.  Comme le dit encore Berlusconi, au Nord, tout est à refaire à zéro. La gauche a disparu et il y a un vote ouvrier de droite très enraciné. Au centre, en Émilie-Romagne et en Toscane, ces bastions historiques du communisme familial et rural, les choses sont un peu différentes. Le PD n’y existe qu’en tant qu’héritier et usurpateur du Pci. L’appareil et l’orientation du parti n’ont plus rien à voir avec ce qu’était le Pci, mais la base souvent reste « le peuple de gauche » : c’est plus une affaire de famille que d’étiquettes politiques. Enfin au Sud, les choses sont très différentes puisqu’il existe dans ces régions un renouveau d’une gauche radicale, jeune, qui trouve son expression dans les partis de l’Arcobaleno. Mais au total, la gauche, divisée, souvent confuse politiquement, est très minoritaire et elle doit rebâtir entièrement à neuf. Si  c’est possible.

Demain donc, la gauche aura perdu. Quoi qu’il arrive.  Le vainqueur est connu : c’est Veltrusconi. L’important se joue après-demain.

Lundi 14 avril

Premiers résultats : le frémissement des derniers jours en faveur Veltroni n’aura pas suffi. C’est Berlusconi qui l’emporte, haut la main. Ce matin dans la presse, on peut lire deux petites informations qui ne feront pas la une mais en disent long.

À Milan, des dangereux sans-papiers sont arrêtés par la brigade volante… Ils étaient en train de coller des affiches pour le compte de la Lega, le parti fascisant d’Umberto Bossi, héros de la soi-disant Padanie. Sur ces affiches on pouvait lire : « Dehors les clandestins ! ».

Deuxième information : à Rome, nous apprend une dépêche d’agence, après l’évacuation musclée d’un camp de « rom » quatre malheureux chatons erraient dans les restes du campement. L’intervention des forces de l’ordre a permis de sauver les chatons. Les chatons valent plus que les hommes…

Mardi 15 avril

Les résultats sont tombés. Sans équivoque. Même les derniers espoirs de la gauche et du centre-gauche se sont envolés. La victoire de Berlusconi est nette et le Popolo della libertà (la nouvelle formation du « Cavaliere », née de l’unification de Forza Italia et de l’Alleanza Nazionale de Franco Fini) est assuré d’une majorité absolue aux deux chambres. À quoi il faut ajouter la poussée forte de la Lega d’Umberto Bossi qui rafle la mise avec près de 10% (contre à peine 5% en 2006) et s’impose dans le nord : elle atteint 25% des suffrages en Vénétie et même 13% dans le Frioule industriel. « Les ouvriers ont voté pour nous », clame Bossi qui a mené une virulente campagne contre les immigrés. À cela il faut encore ajouter les 5,5% réalisés par les rescapés de la DC maintenue, le groupe de Casini qui aura 34 députés et 2 sénateurs. A souligner : en elle-même la poussée du parti de Berlusconi est assez faible (+2% environ) et c’est seulement son alliance avec Fini qui lui permet de présenter le Pdl comme véritable parti dominant. La poussée à droite est surtout une poussée à l’extrême-droite. Berlusconi en est conscient qui propose à Veltroni une collaboration pour les réformes nécessaires à mettre en œuvre, réformes dont il annonce à l’avance qu’elles seront douloureuses.

Au centre-gauche, avec un tiers des suffrages en moyenne, le PD est loin d’avoir réussi son pari de faire jeu égal avec Berlusconi. Certes la coalition du PD de Veltroni et du parti de Di Pietro progresse par rapport à 2006 mais elle profite de l’effondrement de la gauche qui tombe de 11 à 4,2% dont environ 3% pour les partis de la Sinistra/l’Arcobaleno (PRC, Pdci, Verdi, …). S’étant volontairement privé d’alliés à gauche (le mot « gauche » fait presque autant horreur à Veltroni que le mot « socialisme »), le PD est distancé par la droite et il est sans perspective politique. Il se maintient en Toscane mais est largement battu ailleurs, notamment en Campanie, où l’affaire des déchets profite évidemment à Berlusconi (51% des voix) dans une région dirigée par le centre-gauche qui a montré au-delà de tout ce qu’on peut imaginer son impéritie.

Au-delà des résultats détaillés qu’il faudra analyser – parce que l’Italie, c’est la France – l’élément central est l’effondrement de la gauche « radicale » qui se traduit de l’autre côté par une progression spectaculaire des voix de l’extrême-droite (Bossi mais aussi quelques autres petits groupes qui atteignent 3%).  Ce qui est frappant, c’est que cet effondrement de la « Sinistra » est homogène.  Les résultats partout aussi mauvais. Même en Toscane, bastion « rouge », où elle frôlait les 15% en 2006, elle est ramenée à 5%. Dans les Pouilles où le président de la région est un membre du Pdci et donc de la Sinistra/l’Arcobaleno, le résultat est aussi catastrophique qu’ailleurs ! L’avenir de la coalition est maintenant des plus incertains. Fausto Bertinotti annonce sa démission de toutes ses fonctions de dirigeant. Plusieurs dirigeants du Pdci qui avaient marqué leur opposition à la constitution de l’Arcobelano considèrent que les faits ont tranché en leur faveur et qu’il ne faut surtout pas persister dans une voie sans issue. La déroute risque bien d’ouvrir la voie à une nouvelle fragmentation de la gauche déjà mal en point.

Comment expliquer cette déroute ? Comme toujours, les raisons sont multiples et se combinent certainement. Pour une part a dû jouer l’argument du « vote utile » en faveur du PD comme seul barrage possible au retour de Berlusconi. Veltroni a réussi à rafler une partie non négligeable des voix de gauche – ce qui explique que le PD fasse mieux que l’ex-coalition de l’Olivier. Plusieurs personnalités de gauche se sont engagées plus ou moins franchement pour le PD comme « moindre mal ». Ainsi Pietro Ingrao appelle à soutenir Rutelli comme maire de Rome. Dario Fo en participant à la fête de l’Unità à Bologne est allé dans le même sens. Les vedettes de la gauche anti-Berlusconi comme Begnini ont également apporté leur soutien à Veltroni.

Cet argument a dû d’autant plus fortement que l’Arcobaleno était privé de perspective politique au niveau gouvernemental, en raison du refus de Veltroni de reconduire la coalition sortante. Or les partis de l’Arcobaleno étaient associés à la gestion gouvernementale et aux exécutifs régionaux et en pratique n’ont pas montré une orientation politique radicalement différente de celle proposée par le PD.

Pour ces raisons, il ne fait guère de doute qu’une partie de l’électorat radical a manqué à l’Arcobaleno. Il y a presque 1,5% des voix qui se portent sur des petits groupes qui dénoncent la politique d’hésitation et de capitulation de l’Arcobaleno. Ces voix manquant à l’appel font rater le seuil des 4% l’Arcobaleno qui se trouve ainsi privé de toute représentation parlementaire. Plus fondamentalement, le gouvernement sortant qui comptait des ministres Prc, Pdci, etc., n’a tenu aucune de ses promesses de gauche et pas même ce vieux serpent de mer de la loi sur le conflit d’intérêts, a surtout mis en œuvre une politique de restriction du pouvoir d’achat et de réforme du système de retraites dans le sens voulu par l’Union européenne et a poursuivi dans la voie de l’atlantisme, y compris sur la question de renouvellement des baux des bases US en Italie et du contingent en Afghanistan. Même les réformes « sociétales », qui ne coûtent rien et intéressent surtout les classes moyennes intellectuelles, ont été ajournées en raison de l’opposition des démocrates chrétiens de la coalition de centre-gauche, lesquels n’en ont su aucun gré à Prodi, puisque c’est la défection d’un petit groupe de sénateurs, sur ordre de la conférence épiscopale qui a précipité la chute du gouvernement Prodi. En liant son sort à une coalition aussi calamiteuse, la gauche a vendu son droit d’ainesse pour un plat de lentilles. Et maintenant, il n’y a même plus de lentilles !

Voilà pour les raisons immédiates. Mais il y en a d’autres plus fondamentales. La première est sans doute l’inconsistance de cette alliance faite de bric et de broc et surtout de petits appareils (et parfois même d’appareils assez consistants comme celui du Prc) jaloux de leurs prérogatives et qui ne s’unissent que sur le rejet de la politique des DS puis du PD mais nullement sur un projet politique sérieux. On a eu la même chose en France avec les collectifs antilibéraux … et un résultat aussi calamiteux. On peut presque parier que si le Prc s’était présenté seul, avec sa faucille et son marteau, en tant qu’héritier du vieux Pci, il aurait beaucoup mieux réussi et aurait sans doute dépassé les 5%. À un moindre degré, c’est sans doute vrai aussi du Pdci. Au lieu de cela, ils se sont mis en quête de formules magiques attrape-tout, mêlant les revendications des précaires et celles des transsexuels, le tout sous un drapeau arc-en-ciel dans lequel personne ne pouvait se reconnaître ! Un bon vieux drapeau rouge aurait été une carte d’identité bien utile, surtout dans les régions « rouges » de l’Italie du centre.

L’inconsistance théorique et politique de l’Arcobaleno – que nous avions déjà pointée – repose fondamentalement sur la rupture de ses liens avec la classe ouvrière. En cours de route, les dirigeants et les militants ont commencé une sorte d’autocritique : « on a oublié les ouvriers » ! En effet à courir après toutes les « nouvelles avant-gardes » la question ouvrière est devenue une question parmi d’autres et, alors que les conditions de travail ne cessent de se dégrader, que les salaires stagnent face à un coût de la vie en hausse sérieuse (pétrole + céréales, voilà le cocktail détonnant), il aurait fallu concentrer la bataille politique là-dessus et pas se disperser dans toutes sortes de combats secondaires et dépourvus souvent de tout contenu social. Au fond Bossi et la Lega sont les seuls à s’intéresser sérieusement aux ouvriers. À ceux qui craignent pour leur emploi Bossi répond : « chassons les clandestins (c’est-à-dire chassons les immigrés) qui mangent votre pain. » La réponse est sûrement abjecte mais comme il n’y en a pas d’autre, c’est celle-là qui passe.

Derrière cette question sociale, il y en a encore une question épineuse, la question européenne. De ce point de vue, les héritiers du Pci, le Prc et le Pdci, ont repris la tradition « eurocommuniste » du Pci. L’Europe est hors de discussion. Être anti-européen, c’est pour eux absolument inimaginable et c’est pourquoi cette question est complètement passée sous silence. Le traité de Lisbonne ? Qu’est-ce ? Et pourtant, le gouvernement de Prodi a été on ne peut plus clairement le gouvernement aux ordres de la commission de  Bruxelles dont « il professore » Prodi fut, rappelons-le, le brillant président et successeur de Jacques Delors. C’est au nom de la doctrine Ue de l’équilibre budgétaire que les réformes antisociales ont été promulguées par Prodi et c’est au nom des accords de Barcelon que les retraites ont été mises en coupe réglée. Les ouvriers italiens, comme les autres, doivent se serrer la ceinture au nom de l’Europe de la concurrence libre et non faussée. Et comme Bertinotti n’est pas moins européiste que Prodi, ceux qui veulent manifester leur hostilité à cette Europe de la finance n’ont pas d’autre choix que de voter pour Bossi. Dans son inénarrable verbiage, Berlusconi ne manque pas non plus une occasion d’égratigner la bureaucratie européenne. Alors qu’Alitalia est au bord de la liquidation judiciaire pure et simple, que le gouvernement Prodi presse les syndicats d’accepter les conditions de rachat proposées par Air France, c’est Berlusconi qui proclame haut et fort qu’Alitalia doit rester une compagnie italienne… et il n’y a personne à gauche pour mener une campagne pour la nationalisation d’Alitalia ! Il ne suffit pas de dire « on va s’occuper des ouvriers », il faut avoir une ligne correspondant aux intérêts des ouvriers italiens pour avoir une chance d’être entendu et  c’est précisément ce qui a manqué et manque toujours à la « Sinistra » de toutes les couleurs qui a oublié qu’elle devait être rouge.

16 avril

Abbadia San Salvatore est une petite ville bien calme perchée aux flancs du Monte Amiata, en Toscane, entre la province de Sienne et la Maremme. La mairie d’Abbadia San Salvatore se tient piazza Gramsci. Les résultats des élections sont affichés. Un peu plus de 4000 suffrages exprimés. Les deux tiers vont au PD de Veltroni. Ils ne vont pas au centriste Veltroni, et encore moins à ses alliés démocrates chrétiens. Ils vont au parti héritier du Pci. Et dans toute l’Italie, c’est le même scénario : le PD ne se maintient vraiment en position de force que dans les vieux bastions Pci et il le fait en faisant main basse sur toutes les voix Pci qui se portaient aux élections précédentes sur Prc et le Pdci. Mais comme des rouges, il n’y en a plus (à la place on des arcs-en-ciel), reste à voter quand même pour la famille.  Veltroni est un mauvais fils, embourgeoisé, mais c’est encore la famille.

17 avril

Les premières analyses détaillées du vote laissent voir ce qu’on pouvait supposer en s’en tenant strictement à des considérations politiques. Il y a une baisse (faible) de la participation et une augmentation de quelque 300.000 des votes blancs et nuls. Le Pdl e Berlusconi en termes absolus perd quelque 100.000. Mais la Lega de Bossi passe de 1747.000 à plus de 3 millions de voix. On peut penser qu’une partie de ces voix viennent de la coalition Berlusconi, laquelle reste en gros stable parce qu’elle prend des voix au centre-gauche et à l’UDC démocrate-chrétienne (qui perd 530.000 voix par rapport à 2006). À gauche l’Ulivo obtenait plus de 12 millions de suffrages pendant que la coalition « la rose au poing » (radicaux et socialistes) obtenait près d’un million de suffrages. Aujourd’hui, le PD arrive à 12 millions (c’est-à-dire qu’il reste stable en nombre d’électeurs) pendant que le groupe Di Pietro double pratique ses suffrages passant de 877.000 à 1,6 millions de voix. Les grands perdants sont donc les partis de gauche regroupés dans l’Arcobaleno qui perdent 4 millions de voix, au profit de tous les autres, le PD en premier lieu, sans doute aussi en parti Di Pietro et aussi … la Lega !

Question gravissime : pourquoi le vote de gauche paraît-il inutile ? Nous avons eu le même problème en France en 2007 : les candidats antilibéraux (PCF, Bové, …) se sont dits victimes du vote utile en faveur de Royal. Cette explication est une auto-condamnation terrible.

En tout cas, comme on pouvait le prévoir, la défaite a déjà produit ses effets. Le Pdci s’est d’ores et déjà mis en dehors du processus unitaire de l’Arcobaleno. Toute la direction du PRC se présentera dimanche démissionnaire au conseil national de ce parti et les Verdi ne sont pas insensibles aux appels du pied que vient de leur lancer la direction du PD.

Deux exemples à méditer.

La province de Brescia est la plus syndicalisée d’Italie. Brescia a été le théâtre d’un des massacres organisés par les phalanges de l’ordre noir dans les années 70 (le 28 mai 1974, une bombe a été lancée dans une manifestation antifasciste). La Lega de Bossi obtient 27% des voix dans la province et la ville de Brescia passe à droite et un personnage terne du Pdl prend la tête de la ville avec 51,7% des voix. La gauche est à 2,6%. Le président Cgil de la chambre du travail de Brescia, Dino Greco doit faire ce constat : « Nous avons abandonné le terrain, il n’existe plus de relation entre classe ouvrière et vote à gauche ». (Il manifesto, 17/4) Là aussi, l’Italie, c’est la France.

En Émilie-Romagne, jadis vitrine de la gestion Pci, le PD tient bon avec 50% des voix et le Pdl ne dépasse pas 36%. Mais c’est la Lega qui fait un bon avant et prend souvent plus de voix que la gauche Arcobaleno. Alors même que la syndicalisation reste massive, les ouvriers de plus en plus nombreux votent pour la Lega, pas seulement contre les immigrés étrangers, mais aussi contre les « immigrés » du Sud de l’Italie.

Un appel

Il Manifesto publie (17/4) un appel des « communistes unis ». Parmi les signataires des ouvriers, des syndicalistes, des militants engagés dans les mouvements sociaux, des intellectuels (parmi ceux-ci quelques philosophes connus en France comme Gianni Vattimo, Domenico Losurdo, ou encore Luciano Canfora, historien et essayiste politique et Ugo Dotti, l’auteur de la meilleure biographie de Machiavel.)

 


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