D’un côté, des centaines de milliers de manifestants, et manifestantes surtout, réclamant ce droit obtenu par le vote des députés.
De l’autre, des groupes, dont la petite taille est à la mesure de leur puissance quand il s’agit du Pape, ou de cliniques privées pouvant se permettre de réaliser des avortements illégaux contre de fortes sommes.
Dans les fais le cas argentin vient de confirmer que ce combat n’est pas celui d’une gauche contre une droite mais un combat social majeur qui traverse toutes les sociétés. Ne pas comprendre cette réalité c’est perdre de vue l’état des sociétés.
Les femmes ayant des moyens financiers, hier et aujourd’hui, partout dans le monde, peuvent avorter. En Argentine elles peuvent aller en Uruguay par exemple.
En France, Simone Veil avait compris que pour gagner ce droit, il fallait surtout en faire une question de santé publique, et la santé publique est le combat social par excellence, dans tous les pays du monde et pour toutes les époques, un combat jamais achevé.
La vie fait que la santé des hommes et celle des femmes n’a jamais pesé du même poids pour les autorités. Une femme décédant à l’accouchement a été dans la France du XIXème siècle un fait banal jusqu’au jour où, pour reprendre une revanche contre l’Allemagne, des mesures de santé publique ont été prises afin que la mortalité enfantine chute, pour espérer avoir plus de soldat. Il a suffi de prendre des mesures d’hygiènes plus sérieuses qu’auparavant pour changer l'histoire.
Bref, les riches sont toujours mieux soignés, et les hommes riches plus que les femmes en général.
L’Argentine, avec la famille Kirchner, a eu pendant longtemps une gauche au pouvoir, une gauche certes timide mais plus à gauche que le président actuel, et rien n’a été fait en faveur du droit à l’IVG, là comme au Brésil ou au Chili pourtant dirigés par des femmes de gauche. Le pays le plus durs avec le droit est le Nicaragua. Nous ne sommes plus au cœur des années 60 quand la Cuba de Castro autorisait ce droit pour les femmes, car les conservateurs de tous acabits ont repris du poil de la bête. En même temps les luttes des femmes font bouger les sociétés et si l'actuel président conservateur de l'Argentine décide d'un référendum sur le sujet il ne tiendra pas à lui mais aux dites luttes sociales.
En conséquence le droit à l’IVG est une façon de mesurer où en sont globalement les droits sociaux.
Le cas argentin soulève cet autre élément : à quoi sert un Sénat ? Dans nos démocraties et la France n’a pas été la dernière, pour prévenir une décision sociale des députés, il existe un Sénat conservateur capable de décider en dernier ressort. Qui en France a permis de donner enfin le dernier mot aux députés ? La Constitution de la Vème république dont on ne cesse de répéter (et moi avec) sa dimension anti-démocratique. C’est d’ailleurs avec cette idée de supprimer le Sénat que de Gaulle a été poussé hors de la scène politique. Ce point entraîne parfois cette réflexion : quand on est de gauche inutile de rappeler cette avancée démocratique de la Vème république, laissons cela à ceux qui la défendre ! Un point de vue que je ne partage pas.
Combattre la Vème république n’est pas en nier les points positifs par rapport aux précédentes, sous peine de les oublier dans le cadre d’une VIème république !
Mais revenons au droit à l’IVG. Si en France le Sénat avait eu le dernier mot où en serions-nous aujourd’hui ? Dans les rappels historiques le résultat du vote de l’Assemblée est toujours mis en avant et jamais celui du Sénat, comme s’il n’avait pas discuté du sujet et voté !
Pourquoi la Constitution de la IVème république a-t-elle laissé au Sénat toute son autorité ? Les questions s’enchaînent parfois de manière surprenante, cette surprise qui peut tant nus éclairer sur une société.
Jean-Paul Damaggio
P.S. Le lecteur ne sera pas surpris si je précise que je ne suis pas du tout d’accord avec l’article de Jean-Louis Ernis publiée sur ce blog