Asuncion, nouveau sommet du Mercosur, Chavez n’est pas là car Zelaya n’a pas été invité, le président élu du Honduras sera pourtant plébiscité par le sommet. Situation ubuesque ! Les médias s’emballent, un coup d’état latino-américain c’est du pain béni pour eux en période estivale. Mais que nous expliquent-ils ? Que d’Obama à Chavez tout le monde veut neutraliser ce coup d’Etat ? Le précédent président chassé, ce fut Aristide en Haïti. Où en est ce pays aujourd’hui ? Sous contrôle d’armées étrangères ! Faut-il suivre la même pente ?
Prenons la question de plus loin et tout d’abord de cette crise qui est parfois au cœur des débats et parfois si loin de la réflexion. Aux Amériques les pays latinos tournaient avec un taux de croissance autour de 8% environ avec des sommets pour l’Argentine à 12%, et voilà que la crise qui fut niée dans un premier temps (les crédits à risques n’étaient pas la coutume des banques) est plus présente que jamais.
Au Panama, en Argentine, au Mexique la réponse politique est un enracinement plus fort de la droite (au Mexique où elle est déjà au pouvoir, elle prend les airs de l’ancien PRI !). Le tournant de cette histoire est prévu pour le mois des décembre au Chili. Pays crucial, tout indique qu’après la mort de Pinochet, la droite peut revenir au premier plan à cause de la division plus sévère que jamais de la gauche. Le Mélenchon de là-bas s’appelle Marco Enriquez-Ominami et il est doté de 13% dans les sondages les plus sérieux car il réussit à fédérer autour de sa personne toute la gauche authentique. Pour mémoire Enriquez avait comme père un dirigeant du célèbre MIR de 1973. Au second tour le report des voix sur un nom non moins célèbre, Frei, sera difficile et la droite est prête à en profiter.
Au-delà des questions d’élections et de personnes, le problème central s’appelle la crise des partis politiques, une crise internationale mais qui prend dans de telles zones des proportions gigantesques. Au Chili 1% de la population est membre d’un parti (ce pays était connu comme pays politique) et les jeunes ne votent plus. Beaucoup pensaient qu’il en résulterait une perte de légitimité des institutions or c’est le contraire. Plus les taux de participation sont bas, plus la classe politique est homogène car les pouvoirs se concentrent en de moins en moins de mains ! Les abstentionnistes deviennent des fantômes ! Et ils le deviennent d’autant plus que les derniers partis à exister sont ceux qui, ayant un pouvoir, peuvent en répartir des éléments, ce qui est la source de leur ultime raison d’être. Une machinerie implacable… jusqu’au moment où les forces sociales pourront donner à l’alternative qui se cherche les moyens d’une révolution.
Dans ce contexte, le cas du Honduras est un épiphénomène vu la taille du pays, mais j’aime les petits états où les effets se produisent parfois plus vite. On a donc un président élu qui passe des conservateurs au camp progressiste sous un double effet, le mouvement social local conduit par Rafael Alegria (un des piliers de Via Campesina) et le soutien financier de Chavez. La crise étouffe totalement ces poids plume donc la crise du politique y est plus dramatique. Les animateurs du coup d’Etat joue leur carte personnelle face à la carte personnelle de Zelaya. Les mouvements sociaux se mobilisent mais sont-ils électoralement majoritaires ? S’il y a un pays où de tels mouvements sont puissants, c’est bien le Brésil, or, j’espère que le fait de l’été est arrivé jusqu’à vos yeux, le président Lula a co-signé un article avec… Sarkozy ! (j’avoue que le fait a été peu commenté par les altermondialistes !).
Bref, le cas du Honduras confirme la personnalisation de la politique dans le camp progressiste, la fragilité de cette Amérique dont on disait qu’elle est passée à gauche, et l’intelligence d’Obama, un président qui n’a été condamné au Mercosur que par Evo Moralès. Obama s’appuie sur le président du Costa Rica pour négocier une sortie de crise qui permettrait un retour de Zelaya mais aux conditions fixées par le nouveau pouvoir, à savoir pas de nouvelle candidature à la présidentielle.
Détour très schématique par une Amérique où les classes populaires vont souffrir après des années… de souffrance !
27-07-2009 J-P Damaggio
La droite revenant au pouvoir au Chili, cela n'a rien d'étonnant et pas seulement pour des raisons politiques internes.
Au-delà effectivement de la divison de la Gauche et de l'oubli par celle-ci des combats antérieurs qu'elle a menés, il faut dire que comme le dit P. Grenier dans son grand livre sur le Chili "Des tyrannosaures dans le paradis.La ruée des transnationales sur la Patagonie chilienne"(ed. L'Atalante,2005), le Chili est aujourd'hui encore le laboratoire économique du néo-libéralisme le plus agressif. La plupart des grands propriétaires terriens et des membres de la classe dirigeante ont des intérêts financiers aux Etats-Unis.
Aujourd'hui encore l'écart entre les plus pauvres et les plus riches ne cesse de s'accroître. Les quartiers les plus modestes de Valparaiso, Valdivia ou Santiago deviennent petit à petit "bidonvilles". Dans le même temps les stations balnéaires de La Serena et surtout celle de Vina de Mar ne cessent de s'enrichir et d'accueillir les plus riches d'Amérique du Sud ainsi que les américains du nord; dans ces deux villes le prix moyen du mètre carré a progressé de 210% durant les dix dernières années. Alors la gauche chilienne,Bachelet en tête, dans son entêtement à ne pas s'aligner sur Chavez et Morales pour former un front populaire uni face au capitalisme, cette gauche chilienne fait tranquillement le nid de la droite de la droite populiste et "étatsunienne". Décidément, de nos jours les gauches sont bien nullissimes.