Pendant ce temps, de retour du G20, monsieur Sarkozy affiche sa satisfaction. Il proclame la réforme du capitalisme en marche ! La moralisation du système serait sur la bonne voie…
Parole, parole… L’étude produite par Denis Langlet dans son ouvrage « L’industrie dans la tourmente de la finance » est un matériau qui tombe à pic pour démontrer que toutes les déclarations n’engageront que ceux qui auront décidé de bien vouloir y croire. Il s’agit d’un livre explicatif, extrêmement documenté, dans lequel toute affirmation est étayée.
Denis Langlet est ingénieur et par ailleurs élu du personnel et délégué syndical depuis des années dans un grand groupe multinational. Familiarisé aux questions économiques qui rythment la vie des entreprises il a le mérite d’exposer là des mécanismes qui ont conduit à la crise avec simplicité et exactitude, alors que les spécialistes en général se complaisent dans la complexité et la vanité.
Si les seconds cherchent d’abord à interdire aux citoyens la compréhension des évènements sur lesquels ils pourraient agir, Denis Langlet fait l’inverse. Il s’adresse à nous pour permettre d’appréhender et analyser une situation qui pèse sur la société dans son ensemble et sur la vie du plus grand nombre. Son livre est un outil pour agir.
Ainsi, chiffres à l’appui, il dégage l’importance des fonds et leur action notamment dans les opérations dites de LBO dont la caractéristique est de contraindre les employés des entreprises visées –industrie, PME, PMI- à trimer dur pour rembourser une part des emprunts contractés par les fonds afin d’acquérir l’entreprise, puis pour la restructurer et la revendre souvent à d’autres fonds, dans une nouvelle opération de LBO, avec un profit considérable. Evidemment, dans la restructuration, l’entreprise est souvent démantelée, et les employés qui auront travaillé dur pour permettre au fond de s’offrir leur outil de travail seront en partie virés…. Il analyse exemples à l’appui les pressions que les « Hedge Fund », ces fonds hautement spéculatifs, exercent sur les entreprises pour tirer des profits suffisamment rapides et importants dans le seul but de satisfaire gestionnaires et actionnaires. Après une déréglementation impulsée tout autant par les gouvernements de droite et de gauche -1982 et la victoire de Delors et Mauroy dans le gouvernement d’union de la gauche ont constitué un tournant- l’auteur dégage le poids des fonds au niveau international et au niveau national, et leur influence sur les entreprises même lorsqu’ils y sont très minoritaires. Au titre des dossiers qu’il traite, celui de l’Aéronautique prend une valeur toute particulière d’abord pour l’importance économique et stratégique de cette industrie, ensuite pour la mobilisation des fonds et des grandes puissances financières qu’elle suscite….
Dans son ouvrage, Denis Langlet éclaire d’une lumière crue la captation par le capital de la valeur issue du travail.
Evidemment, le discours officiel tenu par les gouvernants, les responsables ou spécialistes économiques, les grands patrons, présente la réalité économique et la crise comme un accident venu d’ailleurs. L’auteur montre bien, là encore avec détails et exactitude, citations à l’appui, la construction politique qui a permis ou conforté la situation de crise dans laquelle nous nous trouvons et dont vont pâtir des centaines de millions d’individus à travers le monde, des dizaines de millions en Europe et en France. Les directives européennes sont citées, analysées. De Rome à Maastricht, de Barcelone à Lisbonne, toutes les décisions qui pèsent sont présentes dans cet ouvrage et permettent de comprendre le travail minutieux du capital et de ses représentants dans le temps et la durée.
Quelques mesures simples renouant avec les traditions républicaines, nationalisation du secteur bancaire, défense de la monnaie, remise sur pied d’un grand plan de développement industriel, défense et extension du secteur public, une simple régulation comme la France l’a connue dans les années 45, s’imposeraient ici et maintenant pour tenter d’entraver la spéculation qui se poursuit et fait des ravages… Les solutions ébauchées par l’auteur donnent un contenu réel à la nécessité de se réapproprier notre souveraineté. Loin de revendiquer en termes abstraits et insaisissables une rupture avec l’Union Européenne qui ne saurait être décrétée, il montre bien que la rupture sera le produit de la bataille politique pour permettre que soient prises les mesures urgentes de défense et sauvegarde qui s’imposent.
L’industrie dans la tourmente de la finance, un travail pour mieux comprendre, et donc pour mieux s’armer, pour agir…
Jacques Cotta
Le 18 novembre 2008
Volià de quoi faire un bon documentaire si on vous en donne toutefois les moyens !