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La lutte pour la paix plus que jamais urgente

après l'attaque israélienne contre une flotte humanitaire

Par Denis Collin • Internationale • Mardi 01/06/2010 • 2 commentaires  • Lu 2289 fois • Version imprimable


L’arraisonnement de la flotille humanitaire qui se dirigeait vers Gaza confirme, si besoin était, le jugement de Régis Debray dans sa lettre « à un ami israélien » (Élie Barnavi) : Israël peut tout se permettre parce que nous lui passons tout. Non seulement le blocus de Gaza est parfaitement illégal et parfaitement inhumain, non seulement l’arraisonnement de navires dans les eaux internationales constitue un cas flagrant de violation du droit international, une des habituelles provocations des fauteurs de guerre, mais il faut encore que la soldatesque procède à un véritable massacre avant de mettre au secret tous les passagers et d’opérer un blocus sur l’information qui rend tristement ridicules les proclamations sur « Israël, seule démocratie de la région ». 

Il faut aller cependant au-delà de l’indignation – surtout quand on voit dans les cohortes des indignés pas mal de dirigeants qui feraient bien de commencer par balayer devant leur porte. L’opération contre la flotille en majorité turque semble insensée du point de vue même du gouvernement israélien. Il n’est même certain que ce gouvernement ait quelque maîtrise que ce soit dans le déroulement de l’opération. De retour du Canada, Netanyahu a apporté son soutien plein et entier à l’armée, mais c’est bien l’armée qui dirige. Entre les militaires et les intégristes religieux, le pouvoir civil apparaît bien de plus en plus comme un pouvoir fantomatique. Un des « blogueurs » de Haaretz (quotidien israélien de gauche), analyse ainsi la situation: « Israël a perdu en mer » et promet pour l’État juif « une place spéciale en enfer ». L’aveuglement des dirigeants israéliens, leur incapacité à penser au-delà des six prochains mois a quelque chose de proprement fascinant. Et le soutien dont ils jouissent dans l’opinion israélienne est plutôt inquiétant – en dépit de la vive réaction de quelques courants hostiles à la guerre et bien convaincus qu’il ne reste qu’une seule solution raisonnable, la coexistence de deux États sur la terre de Palestine, avec la création d’un État palestinien viable (avec un continuité territoriale) et ayant Jérusalem-est pour capitale.

L’enfermement proprement schizophrénique de la classe dirigeante israélienne, soutenue criminellement par les organisations juives officielles en France ou USA, par exemple, des organisations d’autant plus intransigeantes que leurs membres n’ont aucune intention de quitter leurs paisibles résidences de Paris ou de New-York, tout cela aussi est très inquiétant. Inquiétant parce que cette politique renforce les risques d’une conflagration aux conséquences imprévisibles. Quel intérêt le gouvernement Netanyahu pouvait-il trouver à se mettre à dos le seul gouvernement de la région qui lui favorable, celui de la Turquie ? Comment les dirigeants d’Israël peuvent-ils ignorer que le blocus de Gaza sert d’abord le Hamas, qu’ils présentent pourtant comme leur ennemi principal ? On ne peut s’empêcher de penser que le clan dirigeant fait tout pour renforcer le syndrome de la citadelle assiégée, un syndrome qui finit par s’auto-entretenir et qu’ils aident sciemment leurs ennemis, le Hamas et le Hezbollah. Jupiter rend fous ceux qu’il veut perdre.

En même temps que se poursuit l’opération de démoralisation intérieure en Israël – l’appel européen « Jcall » met justement le doigt sur cet aspect – on remarquera que les réactions des Palestiniens restent extrêmement modérées dans les territoires autonomes et que la « rue arabe », comme on dit, est particulièrement atone. Il y a des manifestations assez importantes en Turquie, car la plupart des victimes sont turques, mais ailleurs on ne dépasse guère la mobilisation rituelle. Il est vrai que les principaux régimes arabes de la région apportent un soutien ferme à Israël : la Jordanie persécute ses propres Palestiniens avec une certaine obstination et sans que cela soulève la moindre protestation chez les professionnels de « l’antisionisme » : doit-on en déduire qu’il est mal de persécuter les Palestiniens quand les persécuteurs sont Israéliens mais que c’est très acceptable quand il s’agit du roi de Jordanie. Il est vrai que le prédécesseur de l’actuel roi de Jordanie avait au moins autant de sang palestinien sur les mains que l’État d’Israël. Ajoutons que le blocus de Gaza n’est possible que grâce à la pleine collaboration de l’Égypte – il suffit de regarder une carte pour le comprendre.

Autrement dit, la condamnation de ce dernier coup de force israélien est indispensable. La revendication d’une commission d’enquête internationale s’impose et, disons-le, le chef de l’État, Nicolas Sarkozy, a eu raison de réclamer une enquête « crédible » et « impartiale ». Le seul problème est qu’il ne dit pas que cette enquête ne peut être menée ni par Israël, ni par l’ONU, ni par les États-Unis et que, peut-être, ce serait l’occasion pour l’Europe d’exister ! Dans ces colonnes, nous avons dénoncé et le traité de Lisbonne et la manière dont il a été adopté. Mais peut-être les dirigeants de l’UE pourraient-ils trouver là l’occasion de nous prouver que nous avions tort, que l’Europe n’est pas simplement une machine à détruire les acquis sociaux, mais bien une force de paix capable d’agir sur l’arène internationale.

Le deuxième point important est le suivant. On ne peut condamner Israël sans pointer la responsabilité écrasante des États arabes de la région, y compris et surtout peut-être ces alliés des USA qui font mine de soutenir les Palestiniens mais contribuent systématiquement à leur écrasement.

Enfin, nous qui ne sommes pas sur le terrain des opérations, nous qui ne subissons pas les humiliations des Palestiniens aux « check points » israéliens, nous qui ne vivons pas effacés derrière ce mur de la honte que continuent de construire les dirigeants israéliens, nous ne devons pas encourager les extrémismes et les jusqu’auboutismes, mais bien défendre, par tous les moyens, et en aidant à tous les compromis possibles, la seule solution réaliste pour l’heure: deux peuples, deux États. Après, un jour, « un jour viendra couleur d’orange », comme dit le poète, où peut-être ces deux États pourront ensemble construire une Palestine unifiée, laïque et démocratique, où juifs, athées, musulmans et chrétiens pourront vivre ensemble. Mais en attendant que les rêves se réalisent, il faut essayer de faire un petit pas en avant.


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Commentaires

par regis le Jeudi 03/06/2010 à 02:40

Les partisans de la paix assistent impuissants depuis de longues années à la course folle de l’arrogance et du militarisme croissants des gouvernements israéliens qui ne font que semer la guerre et la haine au moyen orient avec ses répercussions dans le monde. Le mépris le plus complet du droit international : guerres du Liban, à Gaza, non restitution des territoires occupés mais leur colonisation, blocus illégal aussi de Gaza…sans qu’aucune sanction de l’ONU ni autre groupement significatif. Mieux, ils bénéficient du soutien financier et militaire des Etats-Unis, d’accords avec l’ U.E. et, comme vous l’écrivez, de la complicité des états arabes de la région.

Dans ces conditions, difficile de constituer une commission indépendante et impartiale appuyée sur les Etats, il ne reste plus qu’une commission composée de personnalités indépendantes à hautes valeurs morales type commission Dewey mais nécessairement à portée et moyens d’investigations réduits. De toutes façons, peu d’espoir d’espérer une coopération israélienne.

A ce stade d’aveuglement de l’Etat d’Israël, seules des sanctions et mesures internationales pourraient avoir quelque effet pour en revenir aux droits brutalement déniés.

Suggestions soumises à la réflexion, qui pourraient faire l’objet de revendication :

-  fin du blocus de Gaza par l’Egypte avec contrôle et soutien international 

-  suspension de l’accord U.E./Israël conditionné au retour à l’état de droit international.

-  sanctions ajustables par accord international dans le même esprit.

 L’Irak de Saddam Hussein, n’a pas bénéficié d’une telle mansuétude, les sanctions allant jusqu’à l’inhumanitaire qu’il est hors de question ici.   


par Anonyme le Jeudi 03/06/2010 à 12:52

Boycott et sanctions
 
Le boycott représente une prise de position, c'est un acte de dénonciation politique qui se poursuivra jusqu'à ce qu'Israël s'engage clairement dans le respect du droit international, la fin de l'occupation et de la colonisation. (...)
 



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