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Municipales: du gouvernement à la gouvernance

Par Jean-Paul Damaggio • Actualités • Jeudi 27/02/2014 • 1 commentaire  • Lu 1780 fois • Version imprimable


L’année 2014, une année historiquement honteuse pour la France ? Pour la première fois toutes les communes sont passées sous la coupe des com.com disent les initiés, c’est-à-dire sous la coupe de l’intercommunalité. L’année 2014, une année historiquement honteuse puisqu’on va élire au suffrage universel direct les conseillers communautaires sans qu’il y ait la moindre campagne électorale à ce sujet.
L’intercommunalité cheval de Troie de la gouvernance

Pour qui étudie la vie intercommunale une évidence saute aux yeux : la politique n’y tient aucune place. Le gouvernement a été remplacé par la gouvernance. Cette campagne des municipales est donc truquée.

Il y avait eu auparavant deux positions :

- la position communaliste pour qui la lutte municipale est le premier moyen pour apprendre la lutte politique ;

- la position centralisatrice pour qui la vie municipale étant à la remorque du pouvoir gouvernemental, toute lutte politique utile est seulement nationale.

Au sein du PS comme au sein du PCF les deux courants ont toujours pu cohabiter avec ou sans tension. Pour le parti radical, le courant communaliste a toujours alimenté le courant national.

Ces deux positions pouvaient dialoguer car la commune était comme « une république en modèle réduit ». Au nom du gouvernement local, elle avait toutes les compétences. On a vu pendant des années les communes se défaire de la police municipale puis elles reprirent, à juste titre ou non, cette «fonction».

 

La nouveauté radicale de l’intercommunalité a consisté à hiérarchiser les compétences. Pour une part cette stratégie a été imposée par la réalité : aux communes les écoles primaires, aux départements les collèges, à la région les lycées et à l’Etat les universités.

Mais comme toutes les réalités, elles peuvent être tordues : des communes peuvent financer la construction de collèges au nom du fait qu’elles conservent toutes les compétences. La répartition est une proposition et non une obligation.

Plus globalement, l’instauration de la gouvernance s’explique par le mal gouvernement qui découle de la confusion des services et du gaspillage qu’elle entraîne. Et elle s’explique par le fait que de toute façon la vie municipale s’est réduite à demander des subventions, l’autorité centrale dirigeant ainsi l’autorité communale.

Mais les raisons internes de la mise en place de la gouvernance sont mineures par rapport aux raisons externes : tout est une entreprise et dans l’entreprise l’essentiel n’est pas un bin patron mais un bon manager.

 
Un détour par l’histoire

A étudier les municipales de 1935 j’ai pu vérifier que le PS comme le PCF, même dans des zones faibles, faisaient tout les efforts possibles pour être présent en affichant l’étiquette. Le communalisme communiste signifiait : convaincre par l’exemple. La gestion municipale ne pouvait pas être la préfiguration du communisme, mais témoignait que des militants pouvant gérer une commune, pourrait gérer le pays. Et en même temps, ils prenaient à leur niveau, des mesures favorables aux travailleurs. A partir des années 1990, pour des raisons diverses, dans les petites communes les étiquettes disparurent. Pourquoi ?

Dans le rapport national/communal, le communal est devenu émiettement car les forces fédératrices commencèrent à donner des signes de fatigue voire de faillite. Je pense par exemple à la Fédération des Œuvres Laïques mais à tant d’autres qui se trouvèrent concurrencées par une profusion d’associations locales. La tendance cloche-merle est inhérente au communalisme ; le localisme prend le dessus si la tendance centralisatrice devient plus centraliste.

Dans le même temps vont naître deux partis le FN et les Verts. Le FN naît par le centre et n’a rien à faire de la preuve par l’exemple : gérer n’est pas son but. Les Verts naissent d’associations à la base et, dès 1989, ils présentent beaucoup de listes aux municipales puis ils ont été aspirés par la vie nationale. Leur stratégie fédéraliste n’a pas pu les empêcher de tomber dans le centralisme.

Le rôle des médias n’est pas étranger à ces diverses évolutions. Soit ils favorisent le fait divers en le déstructurant d’une pensée globale, soit ils favorisent le fait global sans l’articuler à la « différence » locale. Et le slogan bien connu : « agir local, penser global » n’a pas arrangé la situation en fracturant l’action et la pensée. Si la pensée nait de l’action, c’est en pensant le local qu’on agit globalement ! C’est en pensant les municipales qu’on construit le politique.

La nature politique des élections municipales a donc été massacré par des divers moyens.

 
Et pourtant partout on parle de décentralisation !

A étudier ensuite les municipales au Québec, au Chili ou dans d’autres pays, on entend partout le même discours des autorités. Dans le cadre de politiques de décentralisation, il faut relancer la démocratie communale.

La France se distingue pour deux raisons : la faible taille de ses communes et le nombre considérables de candidats par communes. Il y a plus de conseillers municipaux dans une commune de moins de 100 habitants en France, que dans la capitale de la Californie ! De ce fait, dans notre pays, la participation aux élections est la plus forte aux municipales.

Mais les institutions que s’appelle « hors-sol » et le découpage des nouveaux cantons en est l’exemple le plus emblématique, vont en finir avec ce souvenir.

Quand on découpe un territoire uniquement pour des raisons électorales, ces dernières ne peuvent donner un sens aux nouveaux territoires. Ainsi les intercommunalités sont invisibles (alors qu’elles sont plus qu’électorales) et demain les nouveaux cantons seront idiots. Hier un canton était une entité scolaire, médicale, pour les impôts ou la gendarmerie et quelques autres services. Demain c’est fini.

Pour des élections communautaires il ne pouvait pas s’agir de cocher des noms sur une liste municipale mais de présenter des listes communautaires avec des projets communautaires etc. Pour la première fois, on va élire des candidats qui n’auront présenté aucun projet en lien avec leur fonction.

 
Comment retrouver du politique ?

Les élections municipales de 2014 devraient nous inciter à reconstruire un sens du politique en France. Or, tous les commentaires que j’observe font le contraire et continuent donc à nous enfoncer dans la perte du politique.

Municipales élections locales ? Bien sûr mais si le local (l’anecdote) c’est le contraire du communal (l’élément d’un système) alors on trompe le citoyen.

Municipales, sanction du pouvoir central ? Bien sûr mais si le pouvoir central devient un gestionnaire sans pensée politique, qu’est-ce qui est sanctionné ? Un parti ?

Dans la grande confusion actuelle, le citoyen a de plus en plus la sensation que quand il devient électeur… il perd sa fonction de citoyen !

Et le quand des élections européennes qui vont suivre n’est pas différent !

D’ailleurs, fera-t-on la liste des municipalités où avec le nouveau système (des listes complètes seulement au-dessus de 1000 habitants) il y aura, le jour du vote, autant de candidats… que de postes ? J’en connais qui se frottent les mains : même avec une seule voix, ils seront élus !

Jean-Paul Damaggio

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Commentaires

L'article de JP Damaggio n'apparait pas. par Lalaïta le Vendredi 28/02/2014 à 09:17

L'article de JP Damaggio n'apparait pas.



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