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Pourquoi les ordonnances contre le code du travail sont bien un «coup d'État social»

Par Denis COLLIN • Actualités • Dimanche 24/09/2017 • 0 commentaires  • Lu 2797 fois • Version imprimable


Les classes dominantes et leurs porte-plume, porte-voix, sicaires et spadassins ont bien raison de s’en prendre à Jean-Luc Mélenchon et sa formule de « coup d’État social » qui serait une nouvelle manifestation de « l’outrance » bien connue du dirigeant de la France Insoumise. En effet, c’est là que se trouve le nœud de l’affaire. Les ordonnances – même si elles ne vont pas aussi loin que l’avaient rêvé les plus fanatiques des « libéraux » – organisent une inversion de la hiérarchie des normes et font triompher le contrat de droit privé sur la loi. Au sens strict du terme, c’est bien une opération séditieuse, une subversion de l’ordre républicain, organisée en usant de toutes les ficelles que permet la constitution bonapartiste de la Ve République, avec une chambre aux ordres. Si la loi n’est plus souveraine dans un domaine, il n’y a plus d’ordre républicain dans ce domaine. C’est simple à comprendre, non ?

 

Ce qui est touché, en effet, c’est la définition même de la république dans ce pays : « laïque, démocratique et sociale ». La « république sociale » chez nous a une longue histoire qui commence en juin 1848 quand les ouvriers qui manifestaient pour le droit au travail exigèrent pour la première fois une république sociale, laquelle trouva sa première incarnation dans la commune de Paris de 1871. Les droits sociaux sont devenus des droits constitutifs de la république dans le préambule de la Constitution de 1946 qui a pris une valeur constitutionnelle par une décision du Conseil Constitutionnel en 1972. Ces droits sociaux reconnus dans la constitution (retraite, congés, santé, éducation, égalité des hommes et des femmes, etc.) entérinent les institutions que les luttes sociales et le programme du Conseil National de la Résistance avaient mises en place. Aujourd’hui, Macron applique le programme défini par le numéro 2 du MEDEF, Denis Kessler, il y a quelques années : en finir avec tout ce qui est hérité du programme du CNR.

Pour ceux qui ont lu et pour ceux qui pensent que la pierre de touche est « la rupture avec le capitalisme » (Mitterrand, 1971 !), on doit remarquer que si pour le salariat est la concurrence que les ouvriers se font entre eux pour vendre leur force de travail, la loi est justement le moyen d’abolir cette concurrence et, au fond, de commencer à reconstruire les rapports sociaux sur de nouvelles bases. La limitation légale de la journée de travail, par exemple, longuement étudiée dans le chapitre VIII du livre I du Capital, est tout simplement l’expression la plus claire du communisme, non comme idéal abstrait, mais comme expression du « mouvement réel qui se déroule sous nos yeux ». Ce que les capitalistes et leurs hommes de paille comprennent très bien. La France issue des conquêtes de 1944-1945 est bien un peu « communiste » (comme le répètent les politiciens de droite américains) et il s’agit de détruire ce communisme-là. D’où la haine de Macron et ses amis pour les « trotskystes » et pour LFI.

Voilà pourquoi la bataille contre les ordonnances est la mère de toutes les batailles. Ceux qui se tiendront sur le côté prendront une lourde responsabilité.

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