Ce qui est touché, en effet, c’est la définition même de la république dans ce pays : « laïque, démocratique et sociale ». La « république sociale » chez nous a une longue histoire qui commence en juin 1848 quand les ouvriers qui manifestaient pour le droit au travail exigèrent pour la première fois une république sociale, laquelle trouva sa première incarnation dans la commune de Paris de 1871. Les droits sociaux sont devenus des droits constitutifs de la république dans le préambule de la Constitution de 1946 qui a pris une valeur constitutionnelle par une décision du Conseil Constitutionnel en 1972. Ces droits sociaux reconnus dans la constitution (retraite, congés, santé, éducation, égalité des hommes et des femmes, etc.) entérinent les institutions que les luttes sociales et le programme du Conseil National de la Résistance avaient mises en place. Aujourd’hui, Macron applique le programme défini par le numéro 2 du MEDEF, Denis Kessler, il y a quelques années : en finir avec tout ce qui est hérité du programme du CNR.
Pour ceux qui ont lu Marx et pour ceux qui pensent que la pierre de touche est « la rupture avec le capitalisme » (Mitterrand, 1971 !), on doit remarquer que si pour Marx le salariat est la concurrence que les ouvriers se font entre eux pour vendre leur force de travail, la loi est justement le moyen d’abolir cette concurrence et, au fond, de commencer à reconstruire les rapports sociaux sur de nouvelles bases. La limitation légale de la journée de travail, par exemple, longuement étudiée dans le chapitre VIII du livre I du Capital, est tout simplement l’expression la plus claire du communisme, non comme idéal abstrait, mais comme expression du « mouvement réel qui se déroule sous nos yeux ». Ce que les capitalistes et leurs hommes de paille comprennent très bien. La France issue des conquêtes de 1944-1945 est bien un peu « communiste » (comme le répètent les politiciens de droite américains) et il s’agit de détruire ce communisme-là. D’où la haine de Macron et ses amis pour les « trotskystes » et pour LFI.
Voilà pourquoi la bataille contre les ordonnances est la mère de toutes les batailles. Ceux qui se tiendront sur le côté prendront une lourde responsabilité.
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