Conscients des dégâts sociaux de cette politique, nos strauss-kahniens proposent comme politique sociale ce qu’ils appellent « Social-Ecologie », en fait, le partage du sous-emploi et la gestion de la précarité au prétexte « d’un nouveau modèle de développement » basé sur « la durabilité, la qualité de la vie, la réciprocité… », bref les balivernes habituelles sur la décroissance destinées à habiller la Sécurité Sociale Professionnelle et son corollaire, le contrat-unique-tout-au-long-de-la-vie. Nous avons évoqué plus d’une fois ce dispositif revendiqué tant par l’UMP que par le PS, qui s’appuierait avant tout sur des ressources locales, le désengagement de l’Etat étant l’un des buts recherchés. Nos strauss-kahniens sont là aussi très clairs : « Nous devons faire confiance à l’expérimentation et au contrat pour aller vers un Etat moderne où tous les échelons des collectivités travaillent ensemble pour optimiser l’utilisation d’une ressource publique devenue rare ». La boucle est bouclée. Sachant que l’acceptation de la spéculation mondialisée vide les caisses de Etats, nos sociaux-démocrates germanopratins font mine de voir l’avenir de nos ressources dans la décentralisation, les « pôles urbains » et les « eurorégions ». Mieux encore, ils pensent pouvoir développer là-dessus nos exportations vers les « pays émergents » à travers « les secteurs économiques d’avenir, les énergies nouvelles, les biotechnologies, les industries numériques… ».
Depuis les années 80, nous savons tous ce qu’il en est du remplacement supposé de l’industrie lourde par ce genre d’activités. Des milliers d’ouvriers victimes des délocalisations industrielles à qui on avait promis ces « emplois nouveaux » peuvent témoigner de l’escroquerie. Mais pour nos strauss-kahniens, « le protectionnisme n’est pas la panacée » et « la démondialisation serait une grave erreur. La bonne perspective est de s’engager dans la construction d’une gouvernance mondiale régulatrice et équilibrée entre les puissances d’aujourd’hui ».
Le programme est clair : parachever le démantèlement de l’Etat-nation centralisé pour créer au plus vite un Etat fédéral européen supposé seul capable d’affronter la concurrence grandissante des pays émergents. Ce qui suppose un alignement du coût du travail européen sur celui de ces pays. C’est dit à demi-mot dans le 6e paragraphe consacré à la « social-écologie » que j’évoquais plus haut.
Même si l’on s’inscrit dans cette logique d’adaptation sociale du capitalisme mondialisé, la réalité invalide le programme proposé. L’évolution de la situation des pays européens les plus endettés montre clairement à tout un chacun qu’il s’agit d’une spirale spéculative inexorable. D’un côté, les institutions européennes et leurs Etats-laquais prétendent redresser les pays en difficulté par le remboursement de leurs dettes et la réduction de leurs déficits (au prix de la destruction des emplois et des droits sociaux). Et de l’autre côté, les agences de notation ne cessent de monter plus haut la barre de la crédibilité de ces Etats tandis que les traders spéculent sur la faillite des mêmes. C’est en quoi la proclamation de nos strauss-kahniens balance entre le pathétique et la mauvaise foi.
Mais, pour finir, le plus préoccupant dans tout cela c’est que le programme du PS ne dit guère autre chose. Les strauss-kahniens ont simplement le mérite d’aller un peu plus loin dans le détail et de revendiquer franchement le choix politique.
Pierre Delvaux - le 04 juin 2011
Il faudrait que vous soyez plus précis dans votre analyse car le lien n'est pas évident entre la citation que vous faites et les conclusions que vous en tirez. Pourquoi une harmonisation fiscale devrait-elle nous mettre tous au "régime grec"? Pourquoi un budget européen serait-il nécessairement synonyme d'austérité?