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Sur la crise financière

Notes de Jacques Kirsner

Par la-sociale • Internationale • Lundi 06/10/2008 • 4 commentaires  • Lu 3538 fois • Version imprimable


Nous publions ces notes de Jacques Kirsner sur la crise financière parce qu'elles nous semblent une intéressante contribution au nécessaire débat qui doit s'ouvrir au moment où il apparaît que les discours de Sarkozy et le "G4" n'ont en rien "remonté le moral" des marchés (les principales places européennes ouvrant ce matin sur une nouvelle chute). Nous ne partageons pas nécessaire le détail des analyses de JK mais le cadre général nous semble juste.
DC


Les événements sont évidemment hors du commun, historiques. La planète financière, boursière, bancaire chancelle sous la masse des capitaux fictifs, les montagnes de dettes s’affaissent les unes sur les autres, les titres « toxiques » ( !) brûlent les mains, les faillites se multiplient les géants de la banque disparaissent ou changent de mains, nationalisés, rachetés par d’autres banques, avec la garantie de l’Etat. Warren Buffet, magnat du capital américain a déclaré : c’est un Pearl Harbour économique. Le début d’une guerre tous azimuths. D’abord contre les « collectivistes » a prévenu Sarkozy. Les institutions financières, hypthécaires, assurances qui ne peuvent faire face à leurs engagements, broyés par l’effondrement des bourses sont mises en faillite, absorbées à la casse par des concurrents… ou lorsque le risque systémique est trop significatif, nationalisées. Les dirigeants politiques, les chefs de gouvernements font feu de tout bois. Il faut conjurer la panique, sauver le système sans provoquer… une réaction politique des salariés.

Qu’importe les discours « libéraux » d’hier. S’il faut nationaliser on nationalise sans hésiter. On creuse les déficits, on aggrave l’endettement, ce n’est plus le problème. Il faut sauver le système capitaliste menacé par la crise mondiale. Cette panique provoque, va provoquer dans la plupart des formations, une crise politique majeure. Le secrétaire d’Etat au budget américian a été mis en échec par le sénat et surtout la chambre des représentants. Il a fallu composer, modifier substantiellement le plan Paulson de 700 milliards de dollars. Certes, cette crise est notamment due à la proximité des élections présidentielles américaines. Pas seulement. Dans les pays à tradition démocratique des catastropes de cette nature ne peuvent être conjurées sans un minimum de consensus ou avec un maximum de répression.

Or la crise des subprimes, ses conséquences, la multiplication des faillites ont semé le doute dans l’opinion publique internationale : le système capitaliste ne suscite plus la confiance. D’où le discours de Nicolas Sarkozy : défendre, refonder le « bon » système capitaliste contre le mauvais, composé d’affairistes, d’agioteurs, de spéculateurs, etc… Mais la mauvaise monnaie chasse la bonne ; la place dans la mondialisation du capital financier interdit de séparer production et financiarisation, le bon grain de l’ivraie. C’est l’analyse critique du système capitaliste que les révolutionnaires doivent mener à bien pour révéler l’unité absolue des processus d’exploitation et la dictature des marchés. Si on prétend sérieusement combattre « le capitalisme libéral » alors il faut interdire les paradis fiscaux, saisir tous leurs actifs, interdire toutes les opérations à terme, abroger « l’indépendance » des banques centrales qui ont pendant des décennies nourri la crise, fermer tous les « fonds d’investissements », les agences de notation, en saisissant leurs biens acquis grâce à la spéculation internationale ! Ce sont quelques-unes des premières mesures authentiquement anticapitalistes qui peuvent être prises.

Au vrai, la véritable réponse à la crise financière internationale n’est pas économique. Certes, les économistes -qui veulent aider le salariat- peuvent évaluer, proposer des techniques. Mais la réponse à une crise plus grave que celle de 1929 (Mr Greenspan ancien président de la FED) est, ne peut être que politique. La politique peut certes se traduire en revendications, en mots d’ordre de transition. Mais d’abord, il faut éclairer le cadre général. L’expliquer et stigmatiser le système. L’effondrement du système financier international, à commencer par Wall Street, devra être payé par une classe sociale. La bourgeoisie ou le salariat. Si c’est le capitalisme « refondé » grâce à l’unité nationale dans les principaux pays qui l’emporte, c’est le salariat qui payera la note. Pas seulement sur le plan « économique ». 1929 a enfanté 1933 en Allemagne, le militarisme nippon, le fascisme en Espagne, au final la seconde guerre mondiale.

Jamais la question du pouvoir, du pouvoir démocratique n’aura autant nécessité campagne de propagnade, d’agitation, d’analyse. C’est une urgence. La social-démocratie internationale a dans la plupart des pays, France, Allemagne, Grande-Bretagne, Irlande, Espagne, etc… subi cette tempête sans voir ni savoir. Hébétée. Un dirigeant du PS confiait son impuissance politique : la droite nationalise, la gauche privatise… La social-démocratie est prise à contre-pied. Là où elle est au pouvoir, elle va le perdre, provoquant une progression de l’extrême gauche, mais aussi un développement de l’extrême droite.

Dans l’opposition comme en France, elle se disloque (Michel Roccard se ralliant à Sarkozy) impuissante. Elle vient d’ailleurs d’adopter une nouvelle déclaration de principe qui enterre le socialisme, idéalise « l’économie de marché ». Bertrand Delanoe, probable candicat du PS à l’élection présidentiele a il y a quelques semaines sorti un livre où il se proclame « libéral-social » et revendique une action de « manager », et Dominique Strauss-Kahn, patron du FMI, propose aux dirigeants américains et britanniques, ravis, une théorie sur les « nationalisations provisoires » !
Tôt ou tard, des affrontements majeurs auront lieu. Peu présente dans la presse française, la multiplication des manifestations de rues aux Etats-Unis contre Wall Street a surpris les « observateurs ».

La crise des marchés va bouleverser le système de production. C’est par centaines de milliers que nouveaux chômeurs et précaires vont se compter. Quelle politique, quel gouvernement, en Europe, en France, peut juguler la crise, remettre de l’ordre, assurer le travail pour tous, les libertés, la culture, la santé, les retraites ?

C ‘est autour de ces questions que doit porter une politique révolutionnaire. Les salariés ne se satisferont pas de réponses audiovisuelles, de formules de communicants.

Lorsque Warren Buffet considère qu’il s’agit d’un « Pearl Harbour économique » il veut dire que c’est la fin d’une époque (la mondialisation heureuse), le début d’une autre. Lorsque Trichet déclare que la situation est marquée par une « incertitude absolue », il ne fait pas seulement référence à la situation des marchés. Le plus probable -encore que…- c’est qu’ils éviteront la crise cardiaque mortelle. Mais Trichet sait que le monde capitaliste a un cancer incurable… Durant des décennies, nous avons analysé la situation économique, sociale, internationale. Chaque crise locale (Argentine, Asie du Sud-Est) ou plus globale mais contenue (1987, 1993) nous confirmait qu’une crise majeure se déclencherait un jour ou l’autre, au cœur de l’impérialisme américain, dans la machinerie centrale du système capitaliste. Souvent nous avons exagéré les conséquences de ces soubresauts ; souvent on nous a reproché notre « catastrophisme ». Nous étions un peu les veilleurs du désert des Tartares. Et voilà que le raz-de-marée déferle.

La vieille taupe a finalement fait son travail. La société est sidérée. Nous devons essayer de surmonter cet état de fait. Prendre la pleine dimension de la situation qui est, son développement. Tant que les salariés n’interviendront pas, le débat s’instaurera entre les plus ou moins régulationnistes du système. De Sarkozy à ATTAC (qu’on se souvienne il y a quelques mois d’un appel d’économiste de gauche et d’extrême-gauche pour, déjà, réguler le système en Europe !) chacun va apporter son écot à cette rengaine. En fait, la seule régulation sérieuse, progressiste, efficace, c’est le socialisme. Cette crise va poser ce problème. La révolution va probablement refaire son apparition. Il serait temps que les révolutionnaires se rassemblent. Un club d’action et de réflexion pour le socialisme me semble une bonne idée.


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Commentaires

par Anonyme le Lundi 06/10/2008 à 18:38

De nombreuses banques américaines devraient s'écrouler en 2009

Par Michael Liedtke AP 

SAN FRANCISCO - Nombre de banques américaines ne passeront probablement pas 2009 malgré le plan de sauvetage de 700 milliards de dollars (515 milliards d'euros) du gouvernement fédéral. Mais combien de ces établissements disparaîtront-ils, et comment les autorités gèreront-elles cet aspect de la crise? Là est la question.


par Anonyme le Jeudi 09/10/2008 à 10:34

Un article de Michel Husson

Le capitalisme toxique

La crise à laquelle on assiste aujourd’hui ébranle les fondements mêmes du capitalisme néo-libéral. Elle se développe à une vitesse accélérée, et personne n’est en mesure de dire où elle conduit. Cet article n’a pas pour fonction de suivre pas à pas son déroulement car il risquerait d’être dépassé au moment de sa parution1. Il voudrait plutôt proposer quelques clés d’interprétation et montrer quels sont les enjeux sociaux de cette crise. (...)

La crise confirme de manière éclatante les critiques adressées au capitalisme financiarisé d’un point de vue anticapitaliste et/ou altermondialiste. Tous les économistes qui vantaient les bienfaits de la finance font aujourd’hui de grands discours sur sa nécessaire régulation. En France, Sarkozy n’a pas de mots assez durs pour dénoncer les excès du capitalisme, alors qu’il avait inscrit à son programme le développement du crédit hypothécaire. Le paysage idéologique se transforme donc à grande vitesse et il faut s’appuyer sur la déroute des avocats du néo-libéralisme.

Mais la crise ne crée pas pour autant un climat spontanément favorable aux alternatives. Tous les néo-libéraux reconvertis ont ouvert en grand le robinet d’eau tiède et multiplient leurs propres plans de sauvetage idéologiques à base de transparence, ratios prudentiels, séparation des banques de dépôt et d’affaires, réintégration de la titrisation dans le bilan, limitation des rémunérations des dirigeants, agence de notation, réforme des normes comptables, etc.

Il s’agit, comme dit l’un d’entre eux, de « sauver le capitalisme des capitalistes »6. Ces propositions déstabilisent la gauche sociale-libérale dont c’est au fond le programme. Mais c’est un programme tout à fait minimum qui risque même de détourner des véritables enjeux. Certaines des mesures avancées doivent être soutenues, comme l’interdiction des paradis fiscaux, mais il serait naïf de faire confiance aux autorités financières et aux gouvernements pour les mettre en oeuvre. Il faut les inscrire dans un projet plus large qui vise à éradiquer la finance, et qui mette la question sociale au premier plan. Encore une fois, la source ultime de la financiarisation est le refus de satisfaire les besoins sociaux majoritaires. Par conséquent, on ne peut faire éclater la bulle financière une bonne fois pour toutes sans fermer les robinets qui l’approvisionnent. (...)

http://hussonet.free.fr/toxicapw.pdf


Le problème par la-sociale le Samedi 11/10/2008 à 09:54

Il faut s'entendre sur la nature de la crise et celle-ci n'est pas un simple déréglement financier. Plus exactement en faisant du dérèglement financier la cause d'un phénomène qui se propagerait ensuite à l'économie réelle, on met tout cul par-dessus tête. La panique financière se propage parce que "l'économie réelle" va mal et elle va mal parce qu'il y a des masses considérables de capitaux qui ne trouvent plus à s'investir avec un taux de profit suffisant. Et du coup tous ces capitaux qui s'étaient enflés dans la perspective de profits à venir se révèlent pour ce qu'ils sont, des capitaux fictifs. Toute cette destruction dans précédent de capital - les bourses ont perdu la moitié de leur valeur depuis le début de l'année - et l'impuissance des mesures gouvernementales à enrayer la chute. L'or et la préférence pour la liquidité deviennent les normes de tous dans le sauve-qui-peut généralisé.

Denis COLLIN


par Anonyme le Samedi 11/10/2008 à 12:58

Le régime par répartition protège les retraités français de la crise financière

Par Daniel MARTINEZ AFP - Samedi 11 octobre, 09h20

PARIS (AFP) - Le régime par répartition protège les retraités français des effets de la crise financière, alors que le système de capitalisation à l'américaine, parfois montré en exemple, rend très vulnérables leurs homologues américains, soulignent des économistes et syndicats.



Avec la répartition, les actifs paient, par leurs cotisations, les pensions des actuels retraités, tandis que dans la capitalisation, chaque actif prépare sa propre retraite grâce à son épargne, placée, via des fonds de pension, sur les marchés financiers.

"Le système par répartition est plus sûr. Les retraités français ou les travailleurs de 45 à 60 ans ne s'inquiètent pas à cause de la crise financière, alors qu'aux Etats-Unis de nombreux salariés s'aperçoivent qu'ils ont une retraite plus faible que prévu", a déclaré à l'AFP Henri Sterdyniak, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Ces salariés "vont être contraints de travailler plus longtemps ou partir à la retraite plus tard. La crise justifie toutes les craintes qu'on pouvait avoir sur la capitalisation", a-t-il ajouté.

Aux Etats-Unis, les fonds de retraite ont fondu de quelque 2.000 milliards de dollars ces 18 derniers mois, selon le bureau du budget du Congrès (CBO). Le directeur du CBO, Peter Orszag, a jugé possible mardi que des salariés dépendant de fonds privés très affectés par l'effondrement des valeurs boursières "soient contraints de retarder leur départ à la retraite".

A l'inverse, souligne la présidente de la Caisse nationale de l'assurance vieillesse (Cnav), Danièle Karniewicz (CFE-CGC), la répartition "est un garde-fou incroyable par rapport à des marchés financiers volatils".

Dans ce contexte, plusieurs syndicats français appellent à un développement du système par répartition afin notamment d'enrayer la baisse relative des pensions due aux réformes Balladur (1993) et Fillon (2003). Autrement, on incite les salariés à se tourner vers la capitalisation pour tenter de compenser cette baisse, estiment-ils.

Ainsi, pour la branche retraités du Syndicat national unifié des impôts, la répartition, qui démontre sa "pertinence" à l'heure où la crise touche "les fonds de pensions anglo-saxons", peut "encore être améliorée, dans un pays où la richesse a été multipliée par 30 depuis les années du +Baby boom+".

Ce point de vue est partagé par des économistes, comme Pierre Concialdi (Ires), qui jugent possible une hausse de cotisations permettant d'améliorer les retraites, alors que le gouvernement ne souhaite pas augmenter les prélèvements obligatoires.

Selon Mme Karniewicz, "les recettes, on les a. On dit aux salariés qu'il faudra payer plus pour leur retraite. Pourquoi on n'a pas le courage de leur dire qu'il faut payer plus dans le système par répartition ?", a-t-elle ajouté, estimant que l'épargne retraite a crû en France "parce qu'on laisse bien croire aux gens qu'ils ne s'en sortiront pas autrement".

Les prestations versées aux titulaires d'un plan d'épargne retraite se sont élevées à 4,2 milliards d'euros en 2006 en France (+5% par rapport à 2005), ce qui équivaut à 2% du montant des retraites versées par les régimes par répartition.

Les cotisations ont atteint 9,9 milliards d'euros (+13%) pour l'ensemble des produits d'épargne retraite.

Les bénéficiaires de deux produits créés par la loi Fillon et jouissant d'avantages fiscaux, le plan d'épargne populaire (Perp) et le plan d'épargne pour la retraite collective (Perco), ont aussi sensiblement augmenté. Fin 2006, 1,9 million de personnes détenaient un Perp (+12%) et 202.000 un Perco (+98%).



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