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Chili : Vers l'élection présidentielle

Par Jean-Paul Damaggio • Internationale • Dimanche 03/11/2013 • 0 commentaires  • Lu 1914 fois • Version imprimable


L'Argentine vient de voter pour renouveler la moitié de ses assemblées.

Neuf candidats seront en compétition pour la présidence du Chili, le 17 novembre. Le même jour, des élections législatives vont également renouveler 20 des 38 sièges au Sénat, et tous les 120 membres de la Chambre des députés.Dans les deux chambres l'opposition à déjà aujourd'hui le quorum mais pas assez pour approuver des réformes constitutionnelles comme celles qui veut Bachelet, qui a proposé de rédiger une nouvelle Constitution pour remplacer celle imposée en 1980 durant la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990).Les élections présidentielles et législatives vont appliquer le nouveau système d'enregistrement automatique sur les listes électorales et le vote volontaire, système qui a été appliqué pour la première fois pour les municipales d'octobre 2012, avec une abstention de 60 %. Auparavant le vote était obligatoire.

 

Observons que dans le cône sud de l'Amérique latine, les vieux partis sont toujours là à l'inverse de tous les partis au-dessus du Chili et de l'Argentine. Démocratie chrétienne, PS, PC d'un côté et de l'autre le péronisme certes dans ses variantes mais le péronisme tout de même. Le kirchnerisme l'a emporté à moitié à Buenos Aires, le PS risque de l'emporter à moitié à Santiago.

Les deux candidates capables de gagner sont en effet l'ancienne présidenteMichelle Bacheletpour une nouvelle coalition, etEvelyn Mattheià droite.

Le second tour peut avoir lieu éventuellement le 15 décembre. Quatre économistes, deux avocats, un cinéaste, un médecin et une couturière.

L'ex présidenteBachelet(2006-2010) réunit les quatre partis de la coalition de centre-gauche : le parti socialiste, la démocratie chrétienne, la démocratie radicale et le parti communiste et un petit parti nouveau nommé citoyen de gauche.

La principale rivale de Bachelet estEvelyn Matthei, ancienne ministre du travail de Sebastian Piñera et candidate de l'Alliance, la coalition conservatrice qui regroupe l'Union de démocrate indépendante (UDI) et rénovation nationale (RN). Les candidats sont choisis par une primaire et c'était Pablo Longueira qui avait gagné mais il a démissionné le 17 juillet à cause d'une dépression.

Enriquez-Ominami, un cinéaste de 40 ans est sorti des rangs du socialisme en 2009, se présentant comme une alternative, aux présidentielles de cette année là. Il a obtenu 20,19 % des voix et a fondé le Parti progressiste. Cette fois les sondages lui donnent moins de 10% ce qu’il s'explique par le fait que Bachelet a repris l’essentiel de ses propositions comme la mise en place d’une nouvelle constitution. En 2009 le candidat de la Concertation était un démocrate-chrétien aussi l’espace politique du Parti progressiste était plus grand.

 Parisi, un économiste de 45 ans, se dit le porteur de certains mouvements sociaux et il critique la politique traditionnelle en se disant prêt à prendre le meilleur de la droite et de la gauche. En fait un centriste qui va pouvoir récupérer des voix démocrates chrétiennes peu disposées à soutenir la nouvelle alliance de Bachelet.

Cinq autres candidats seront présents. Trois d'entre eux sont situés à gauche de la nouvelle majorité de Bachelet, commeRoxana Miranda, la troisième femme candidate, la couturière de 46 ans et présidente du parti de l'égalité, fondé en 2009 avec le soutien de divers mouvements sociaux.

Le Parti vert présenteAlfredo Sfeir, un économiste de 65 ans qui a travaillé pendant 30 ans à la Banque mondiale.

Tomás Jocelyn-Holt, ex-membre du parti démocrate-chrétien est candidat indépendant, et Ricardo Israel, est le candidat du parti des régionalistes (PRI), formation du nord.

Et enfin dernier candidat, le quatrième dans les sondages : Marcel Claude qui se définit comme écosocialiste. http://todosalamoneda.cl/

Il s'agit d'un économiste soutenu par une coalition dont le pivot est le Parti humaniste. Né à Santiago en 1957 il fait figure d'homme hors cadre habituel et le soutien du Parti communiste à la candidate socialiste semble lui ouvrir un grand nombre de portes. D'abord fonctionnaire de la Banque centrale du Chili, il décida ensuite de mettre ses compétences au services de fondations dont Terram qu'il créa pour aider au développement soutenable au Chili. Mettant en cause les industries du saumon et de la forêt, prenant position contre le néo-libéralisme, il est devenu la bête noire du journal El Mercurio.

Avant le coup d'Etat il avait été membre des Jeunesses de la Démocratie chrétienne puis ensuite il poursuivit ses études à l'université catholique de Louvain en Belgique.

En 2005, dans le cadre d'une alliance incluant y compris par le Parti communiste, il a soutenu le candidat du Parti humaniste, Tomas Hirsch, mais sans adhérer à ce parti.

En Amérique latine le parti humaniste a une véritable base sociale et ne peut donc se confondre avec les variantes européennes comme celle de France. Rappelons que l'homme de référence de ce courant, Mario Rodríguez Cobos, est un mystique né en Argentine en 1938 où il décède en 2010. Le logo est le ruban de Möbius qui illustre l'intrication entre les aspects personnels et collectifs, «les deux faces» de la société. Le PH considère en effet impossible de transformer la société sans se changer soi-même, et inversement. Un de ses aphorismes humanistes a fait fureur en France : "L'humain d'abord".

Les lecteurs hispanophones peuvent retrouver ses thèmes de sa campagne en cliquant sur le lien en début d'article. On y trouve la revendication devenue populaire d'une assemblée constituante, la proposition d'une société des droits (à la santé, à l'éducation, à la retraite...), la recherche d'une société adaptée aux peuples d'origine, la nationalisation du cuivre et des grandes mines, des revendications écologistes.

 

Conclusion

La bataille électorale fait rage dans la rue au Chili - affiches, banderoles, réunions-  mais peu dans les journaux. La télévision a présenté les neuf candidats. Le Chili qui a été la pointe d'une révolution pacifique avec l'Unité populaire, puis d'un néo-libéralisme féroce devenant soft après la victoire du NO en 1988 (je ne sous-estime pas l'importance concrète de cette mutation) peut-il surprendre le 17 novembre ? L'affrontement social conduit par les étudiants reste au second : une dirigeante comme Camilo Vallejo se présente député avec le soutien du Parti communiste et du parti socialiste... En fait, l'entrée du PC chilien dans l'union tourne une page de l'histoire au moment où le vote cesse d'être obligatoire, en conséquence les abstentionnistes risquent, à Santiago comme ailleurs, de devenir le peuple majoritaire. Le Chili d'aujourd'hui n'est pas prêt à inventer la révolution du XXIème siècle.

 
Jean-Paul Damaggio

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