Dans un article précédent Denis Collin nous invita, de belle manière, à lire le livre de Julien Landfried contre le communautarisme. Dans sa conclusion, parmi les questions à traiter pour combattre les communautarismes il mentionna naturellement l’instruction. Or, dans notre chère Education encore nationale, à l’âge du lycée, se met en place dans quelques établissements expérimentaux une « discrimination positive » porteuse bien sûr de communautarisme.
Voyons les faits pour commencer : depuis l’automne 2006, le lycée A. Bourdelle de Montauban met en place un partenariat entre le lycée et l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse dans le cadre des projets « Ambition Réussite ». Il s’agit de permettre à des élèves de très bon niveau scolaire de passer le concours d’entrée de l’IEP en bénéficiant d’une préparation particulière, en petits groupes. Ces élèves sont choisis à partir de critères divers. Le lycée doit aider à la promotion d’une « élite scolaire » à laquelle on donne une chance de poursuivre des études « d’excellence » et qui « redore l’image de lycée « ghetto » ». L’IEP diversifie son recrutement afin d’avoir des classes dominantes issues de tous les milieux. Les moyens mis en place sont les suivants :
•des réunions entre les 6 établissements de Midi-Pyrénées qui sont associés à ce projet avec des professeurs de l’IEP afin de produire un travail collectif et constructif.
•des séances de travail le mercredi avec les élèves de seconde, première et terminale concernés par le projet et intéressés.
la participation à un concours blanc commun pour les terminales, à un débat commun sur l’égalité des chances pour les premières...
Il s’agit bien d’une démarche de « discrimination positive » mise en place sans la moindre discussion sur le fond. Les enseignants sont mis face à ce dilemme : ou ils aident quelques enfants repérés, ou la sélection restera la même. Chacun imagine les discussions qui peuvent en découler en salle des profs. « Et si cette stratégie était le point de départ d’une réforme globale nous amenant pas à pas à l’égalité ? »
Une des questions clefs tourne autour du mode de sélection des établissements inclus dans le projet, et du mode de sélection d’enfants destinés dès la classe de seconde à l’IEP. Et déjà on oublie la discussion sur le principe « discrimination positive » puisque de toute façon il se met en place. Les luttes pour l’instruction vont-elles devenir des luttes pour élargir le champ des bénéficiaires de la discrimination positive ?
Et à présent, passons au communautarisme qui est différent du sens de la communauté. Aux USA, il était plus facile d’instaurer une discrimination positive à partir du moment où il est admis qu’avec un caractère négroïde, on est noir, et que les noirs devaient être les bénéficiaires du projet pour « colorer » la classe dominante. Même dans ce contexte où le communautarisme existe (après une adhésion profonde à la communauté nationale comme le pointe très bien Denis Collin) la discrimination dite positive (pourrait-on dire un racisme positif ?) alimente le communautarisme. Dans un lycée français, les élèves choisis vont contribuer au communautarisme. Comme autrefois les lycéens faisant latin-grec ? Pour affronter la contre-révolution du fait accompli, je laisse la question ouverte.
10-05-2007 Jean-Paul Damaggio