Stasnislav Markelov assassiné
Carine Clément
Stas Markelov – militant des droits de l’Homme, avocat d’Anna Politkovskaïa et spécialiste des crimes commis en Tchéchénie – a été assassiné le 19 janvier 2009 à Moscou.
Stas était de tous les combats, sur tous les fronts, à défendre les victimes des injustices, à propager ses idées, à voyager aux quatre coins de la Russie. Et toujours avec le sourire et la blague prête à partir. Jamais à se prendre au sérieux. Un copain, un camarade courageux, intelligent, simple et chaleureux. Pour des centaines et des centaines de militants de la plupart des régions de Russie.
Il a été assassiné, en plein centre de Moscou, en plein jour, d’une balle dans la tête. La seule envie après ça, c’est de crier et hurler, sa douleur, son indignation, sa colère ! Personne ne le rendra à la vie, mais les coupables et surtout les commanditaires doivent payer.
C’est l’escalade ces derniers mois, trop de crimes et d’agressions, trop de sang versé. Pourquoi ? Qui en Russie est persuadé que la lutte pour la justice peut ainsi être stoppée d’un coup de revolver ou d’un coup de batte de baseball ? C’est vraiment prendre les gens pour des idiots ou du bétail, ce que ne se gênent pas de faire publiquement quantité de hauts fonctionnaires et hommes politiques véreux. Ou alors c’est vouloir que dans ce pays, les conflits sociaux et politiques se règlent non pas devant les tribunaux ou dans les manifestations, mais le révolver au poing. Qui précipite la Russie dans une nouvelle ère de banditisme politique ? Qui ?
Stanislav Markelov était de ceux qui s’étaient engagés corps et âme dans le combat pour la justice, en croyant jusqu’au bout aux armes du droit, de la solidarité, de l’information indépendante et du militantisme.
C’était un avocat, mais un avocat militant, et de gauche, en plus, qualité rare en Russie, si ce n’est unique. Un allié infatiguable des mouvements sociaux.
Les flics venaient vous arrêter en pleine nuit au lendemain d’une action antifasciste ou d’un blocage d’une tentative d’expulsion ? On pouvait appeler Stas, toujours prêt à prodiguer au moins conseils, si ce n’est à prendre le premier métro si l’affaire était sérieuse et dangereuse pour le soi-disant inculpé.
On parle surtout de ses activités en Tchétchénie. Depuis la première guerre en Tchétchenie il travaillait sans relâche pour que les coupables de crimes de guerre paient, et paient à la mesure de leurs actes. La dernière affaire en date, qui lui a sans doute valu d’être ainsi exécuté, concernait celle de la famille Koungaïev dont il s’était fait l’avocat. Leur petite fille Elza, a été violée et étranglée par le colonel Boudanov en mars 2000. Celui-ci a été condamné en 2003 à 10 ans de prison, mais a été relâché de façon anticipée le 15 janvier 2009. Markelov avait fait appel contre cette décision devant la Haute Cour de justice. Il a été assassiné en sortant de la conférence de presse qu’il donnait à ce sujet, le 19 janvier.
Au-delà de la Tchétchénie, Stas était un fin connaisseur du Caucase, œuvrant sans fin à la pacification de la région, à l’entente entre les peuples et au développement des initiatives citoyennes indépendantes. Entre autres, il a animé un débat à ce sujet au Forum social européen de Malmö en septembre 2008, où il avait fait venir militants ingouches, géorgiens et ossètes pour un débat houleux mais fraternel et puissant symboliquement.
Il s’est énormément impliqué dans le combat antifasciste, représentant dans les procès les militants antifascistes injustement accusés de meurtres ou d’agressions sur les fascistes (la police russe a une fâcheuse tendance à confondre fascistes et antifascistes et d’éprouver une certaine sympathie pour les premiers), plaidant pour les victimes des agressions fascistes, multipliant publications et interventions publiques contre toutes les formes de racisme, de xénophobie et de fascisme.
Il défendait tous les militants sincères et menant le combat contre la corruption, pour le respect minimal des droits sociaux, écologiques, syndicaux. Il fut ainsi l’avocat de Mikhail Beketov, ce journaliste et militant du mouvement des habitants de la ville de Khimki en banlieue de Moscou, passé à tabac le 13 novembre 2008 et toujours au bord de l’agonie aujourd’hui.
Il participait aux Forums sociaux de Russie, aux manifestations des mouvements sociaux, mettant son savoir de juriste au service des militants, expliquant sans relâche comment se comporter devant les policiers, comment utiliser la législation à bon escient, comment faire respecter ses droits. Lors du dernier Forum social à Irkoutsk, début août 2008, il m’avait dit en avoir marre d’en être réduit à son rôle d’avocat et vouloir également participer aux débats politiques du mouvement, pour pouvoir exprimer ses idées et ses convictions.
Car c’était un homme de conviction. Un militant de gauche au sens noble du mot : pour la justice, l’auto-organisation, l’égalité entre les peuples, les hommes et les femmes. Contre le libéralisme ravageur et le capitalisme brutal régnant en Russie depuis les années 1990 qui, selon lui, avait mené à la catastrophe politique et humaine des années 2000, notamment à la montée du fascisme et du banditisme politico-économique.
Pour qu’il n’y ait pas de confusion, et en mémoire de lui, je tiens à préciser qu’il n’avait rien à voir avec ceux qu’on appelle en Occident « l’opposition au Kremlin ». Il a toujours condamné cette « Autre Russie » de Kasparov et Limonov, accusant ses leaders d’être des droitiers libéraux, méprisant le peuple.
La dernière fois qu’on s’est vu, c’était au rassemblement du 30 novembre 2008 à Moscou contre la série d’agressions que venaient de subir des militants du mouvement social et syndical (je faisais alors partie de la liste). Il a fait une intervention à la tribune condamnant ces attaques « contre la justice » et appelant les militants à organiser collectivement leur autodéfense. Il m’avait alors confié qu’il avait désormais peur de répondre au téléphone : « chaque fois que le téléphone sonne, j’ai peur qu’on m’apprenne qu’un nouveau camarade et ami a fait l’objet d’une agression ».
Aujourd’hui, Stas, personne ne t’appellera, mais on a tous reçu ce coup de téléphone assassin…
* Carine Clément est sociologue. Elle dirige de l’Institut de l’action collective à Moscou.
(20 janvier 2009)
http://www.alencontre.org/Russie/RussieMarkelov.html
Publicité pour l’histoire avec un extrait d’article et aussi un avis de sortie A Droite toute, source L’Histoire n°339 mensuel papier de février 2009, p.16 :
Au secours ! Staline revient ! « Les membres de Memorial, association fondée en 1988 par Andrei Sakharov, pour sauvegarder la mémoire de la répression stalinienne, n'en sont pas revenus : le 4 décembre 2008, les nervis du pouvoir ont mis sens dessus dessous le siège de Saint-Pétersbourg, puis ont emporté des disques durs d'ordinateurs et des liasses de documents. Pour Nicolas Werth, un des meilleurs spécialistes de l'histoire soviétique, cela n'a rien d'un hasard : « Ils ont agi la veille de la conférence que Memorial organisait à Moscou. L'opération se situe dans le durcissement idéologique du régime qui en vient maintenant à réhabiliter Staline. Lors de la conférence, nous avons interrogé le ministre de l'Enseignement sur l'autorisation qu'il avait donnée à la publication d'un manuel scolaire qui qualifie Staline de "dirigeant efficace et fondamental". Les échanges ont été vifs, le ministre a refusé de s'expliquer. » Officiellement, Memorial est accusée de liens avec un journal d'opposition et, à ce titre, ses responsables sont sous la menace de la récente loi sur l'extrémisme qui punit les coupables de huit ans de prison ».
Parmi d’autres articles une courte brève p.35 : « Qui a tué Jimmy Hoffa ? leader syndicaliste du syndicat des camionneurs américains. Cela m’a rappelé un film vu à Joinville le Pont dans les années 70 Fist et aussi un vieil air de « folklore » américain --) Qui est responsable et pourquoi est-il mort…
En couverture de ce n° une vue de Chicago et à l’intérieur un dossier p.38 à 65 consacré à cette ville avec photos en noir et blanc dont celle du « massacre de la St Valentin » et pages en couleur, dommage en noir et blanc n’y sont pas photographiés les abattoirs de Chicago, mais je me souviens un peu d’un livre lu La Jungle, Upton Sinclair ami aussi de Jack London.
Et puis surtout après le dossier d’avril 2008 « Marcel Bluwal, le dinosaure des Buttes Chaumont » une nouvelle page (p.28) est consacrée à cet enfant caché 26 mois avec sa mère en des temps noirs de Douce France, la cache commença en 1942 mais quel M.O.I ? le temps des rafles !
La sortie en DVD du film de ce toujours jeune travailleur réalisateur qui se dit marxiste hégélien est annoncée pour le 9 février 2008 « A Droite toute » de Marcel Bluwal, 1 FIPA d’argent et 2 FIPA d’or décernés en 2008 et autres prix, sources pour en savoir plus et éventuellement se procurer ce DVD disponible également par le biais de bonnes librairies ou bons disquaires : http://www.phares-balises.fr/fiche_films.php?film=595.
Les années 30 en Douce France, le 6 février 1934, le Front populaire, etc..toute ressemblance avec des personnages ayant existé ou toujours existants ne serait que pure coïncidence : action française, cagoulards, camelots du roi, 200 « grandes familles », actions terroristes perpétrées par des cagoulards entre juin et septembre 1937, asssassinats de Carlo et Nello Rosselli, etc.. tout y sera.
Ce film, réalisé par « le dinosaure des Buttes Chaumont », co-auteur Jean-Claude Grumberg, est joué entre autres par Bernard-Pierre Donnadieu (bientôt dans la peau de l’ex maire de Lille Roger Salengro chez Yves Boisset http://www.lavoixdunord.fr/Locales/Valenciennes/actualite/Valenciennes/2008/07/03/article_yves-boisset-et-donnadieu-ressuscitent-s.shtml) et Didier Bezace (La Commune d’Aubervilliers), serait aussi diffusé en 2 parties le 8 (et pas le 6 de février 34) février 2009 sur une chaine publique FR3, cela reste à confirmer, j’ai ni la TV ni le programme mais vu cette info sur la toile : 2 parties à 20h35 et 22h15.
Pour finir en beauté avec l’histoire oubliée p.68 à 73: « Qui se souvient des « modernas » ? » l’Espagne un peu ?