Le ton est donné : l’accession de la gauche au pouvoir en 1981 a été aussi le moment de sa conversion au réalisme. « Changer la vie » : Moati affirme qu’il s’agissait là d’un slogan « métaphysique ». Il n’est pas possible de changer la vie et le vrai bilan de l’expérience de 1981, celui sur lequel la grande majorité des commentateurs s’accorde est qu’on ne peut pas « rompre avec le capitalisme » et encore moins construire un « socialisme à française ». Enrobez tout cela de sociologie à quatre sous et vous avez la teneur de ce qui se raconte aujourd’hui.
L’histoire de « l’horrible décennie » quatre-vingt reste à écrire, encore que Jacques Cotta et moi-même l’ayons esquissée dans un ouvrage toujours utile, L’illusion plurielle, pourquoi la gauche n’est plus la gauche ? (JC Lattès, 2001). Toujours est-il qu’il revint à la gauche et au PS en particulier d’organiser la « grande transformation » de cette décennie, c’est-à-dire la liquidation du keynésianisme et la mise en place d’un nouveau mode de gestion du capitalisme. Quelques années après les promesses d’une rupture du capitalisme « en cent jours », on devait s’atteler au « sale boulot » selon les mots même de Laurent Fabius au moment où le gouvernement de la gauche avec le CFDTiste Chérèque à la manœuvre parachevait la liquidation de sidérurgie lorraine et plus généralement organisait l’explosion de la vieille classe ouvrière. Il devait revenir aux dirigeants « socialistes » de célébrer « la France qui gagne » au moment même où la gangrène du chômage ravageait les classes populaires, précipitant toutes ces couches laborieuses qui avaient fait la victoire du 10 mai 1981 dans l’abstentionnisme ou le désespoir lepéniste…
Évidemment, si aujourd’hui fleurissent les discours sur le 10 mai 1981, c’est que nous sommes à la veille d’une nouvelle élection présidentielle et les socialistes pourraient l’emporter en mai 2012. Le niveau catastrophique de la popularité de l’actuel Président leur laisse de bons espoirs de ce côté-là. Pourtant, rien n’est réellement réglé. L’arrivée de DSK dans une Porsche à 120 000 euros est venu rappeler combien le PS est souvent devenu le parti du fric, un parti, dans certaines de ses fractions, qui n’a rien à envier en matière de « bling-bling » à l’hôte de l’Élysée. Sans doute est-il injuste de faire payer au PS dans son entier les gaffes, les comportements de diva et les âneries politiques de l’actuel directeur du FMI. Mais personne n’oblige le PS à attendre DSK comme le sauveur suprême. Au-delà des conflits de personnes et de l’invraisemblable affaire des « primaires » qui pourraient bien être la grande chance de Nicolas Sarkozy, il y a une question d’orientation politique. Même les bonnes idées de la convention pour l’égalité sont restées confinées aux quelques socialistes qui se sont investis dans cette affaire. En pratique les socialistes, en bons européistes, restent globalement inaudibles : comment croire quoi que ce soit des vagues promesses faites ici et là quand on accepte comme indépassable l’Europe de Maastricht à Lisbonne, l’Europe de l’euro et des plans d’austérité en Grèce (gouvernement « socialiste »), au Portugal (gouvernement « socialiste ») et ailleurs ?
Les causes politiques demeurent qui ont conduit à la décomposition des années 80 et à la désaffection de l’électorat populaire, surtout ouvrier, à l’égard du PS et plus généralement de toute la gauche. On doit constater amèrement que seule Marine Le Pen a un discours (seulement un discours !) tourné vers la défense des ouvriers et des travailleurs indépendants puisque seule elle met radicalement en cause l’européisme et la mondialisation. Que ce discours soit incohérent et démagogique, peut-être. Mais où est le discours mobilisateur qui pourrait la contrer ?
??? et là hélas tout passe, casse, lasse, classe sociales et luttes remisées dans les poubelles de l'histoire
"...L’histoire de « l’horrible décennie » quatre-vingt reste à écrire, encore que Jacques Cotta et moi-même l’ayons esquissée dans un ouvrage toujours utile, L’illusion plurielle, pourquoi la gauche n’est plus la gauche ? (JC Lattès, 2001)..."
Rappel bizarre ou anachronique de la parution 2001 d'un livre lu en son temps avec bilan global à posteriori ? mais 2001 c'était quand même bien si je sais encore compter "Vingt ans" après le 10 mai 1981? ce soir là tant étaient dans les rues pour crier leur gaité et leur espoir, ils avaient raison mais aussi se méfiaient et puis en 2001 restaient quelques-unes de mes connaissances affiliés et encartés au PS, au PC, au MDC, dans ces ""partis se proclamant de la classe ouvrière, de la lutte de classe, du socialisme et communisme à venir, reste à faire pour 2011 le bilan de ces affiliations et des dés déjà pipés, l'histoire ne se répète jamais de même façon mais là le front unique existe toutes tendances confondues sans rivages à gauche ni à droite tout se ressemble et s'assemble encore plus, les médias rapportent les paroles de quelques chefs râleurs qui jouent le jeu du désaccord pour nous faire avaler de nouvelles couleuvres...RSA encore ces jours ci au devant de l'actualité...travail gratis 20h par mois comme au bon vieux temps en certains pays..
"Reprise" 1968 Tapie et ses piles W-M ou plutôt reprise dans le sujet du jour au jour le jour :1981 Vinrent très vite et tragiques "Les illusions perdues". 2001: oui mais il en aura fallu du temps court ou long pour tenter d'expliquer le pourquoi du comment nous aurions été dupés ou trop naifs ou plutôt réformistes ? Les prémisses étaient visibles :le programme "commun" de la "gauche" et ses bagarres de chefs, est-ce que quelque chose a changé 30 ans après ? Il est toujours si facile ou comode d'analyser la situation des classes laborieuses et de leurs soi-disant "représentants" à Contre-temps. Les choses ne changent que rarement et surtout ne changent que si les rébellions et grèves de masse existent et effraient la classe miroir de l'impériailsme stade suprême du capitalisme, 1936! mais ça n'a pas duré, "environnement" durable hostile Espagne, Portugal, Italie, Allemagne, etc.Le POUM fini...je n'ai plus le temps de relire et finir "La recherche du temps perdu", à +