Suite aux manifestations, certes massives, de hier Jeudi 19 mars, je suis aujourd’hui perplexe, inquiet et souhaite que le mouvement social trouve un débouché social et aussi un débouché politique.
Je m’explique sur ma perplexité et sur mon inquiétude.Certes 3 millions de manifestants c’est plus que le 29 janvier dernier mais que fait-on après ? Quel débouché social et politique est-il envisagé, lancé ou proposé ? Que doit-on faire? De nouvelles grèves durables et continues ou une nouvelle journée de grève dans un mois ou attendre un mouvement le 1er mai ? etc… etc…
Oui, il faut s’en réjouir, hier il y avait plus de manifestants dans toute la France que le 29 janvier. Un bémol, il y avait moins de grévistes (ça m’inquiète pour la suite) et certains manifestants avaient pris des RTT ou des congés.Doit-on lancer une nouvelle journée d’action ? Je réponds cela dépend des objectifs , des résultats obtenus et des débouchés que le mouvement social et politique souhaitent !
Si c’est pour faire un téléthon (ou un manifesthon) du nombre de manifestants c’est à dire de passer de 2,5 millions à 3 millions et peut-être la prochaine fois 3,5 millions ou 4 millions, battre des records ! ça ne sert à rien ! Si c’est pour ne rien faire céder au gouvernement et au patronat ça ne sert à rien aussi !La réunion intersyndicale de ce matin est décevante. Rien de concret n’a été décidé. Les syndicats se revoient le 30 mars prochain pourquoi faire ? Pour quels objectifs , pour quels débouchés à mettre en perspective. Nous n’en sauront rien. Décevant mais cela ne me surprend guère ! Il envisage seulement le 1er mai unitaire. Sarkozy et les patrons doivent trembler avec de telles perspectives d’actions !!!!!!
Entre ceux qui voudraient une nouvelle journée d’action avant le 1er mai (Sud-Solidaires et la FSU) et les autres (y compris la CGT) qui souhaitent attendre et voir venir en proposant rien avant le 1er mai.
Les raisons évoquées sont qu’en avril il y a les vacances et surtout il ne faut trop saturer le mouvement social. Là, c’est du n’importe quoi ! Nos responsables syndicaux nous demandent de faire relâche en Avril !Je leur répondrai que le système capitaliste en crise, le patronat réactionnaire, la commission oligarchique de Bruxelles et le gouvernement Sarkozy-Fillon ne font pas relâche une seule minute ! D’où mon incompréhension et mon inquiétude, voire mon écoeurement partagés par de nombreux citoyens manifestants et salariés.
Certes, il y a les mobilisations sur les sites industriels ou commerciaux en crise grave ( fermetures, licenciements, délocalisations, remise en cause des avantages sociaux acquis…). C’était le moins, que les dirigeants syndicaux pouvaient faire ! Car la lutte, la grève, les manifestations, les mobilisations sont là (Continental, 3 suisses…etc…) et n’ont pas attendu pour agir !Je voudrais dire aux syndicats dit “durs” SUD et FSU qui souhaitent une nouvelle journée d’action avant le 1er mai que c’est maintenant inefficace car le gouvernement Sarkozy-Fillon n’a rien cédé, le patronat non plus ! Les deux manifestations de ce mouvement populaire n’ont débouché sur rien ! rien de concret mais alors rien sur le pouvoir d’achat, la hausse des salaires, l’arrêt des suppressions d’emplois dans la fonction publique, rien sur l’arrêt du démantèlement des services publics ! rien sur les privilèges écoeurant de la classe dominante capitaliste ! Que chique !!!
Donc nous devons passer à autre chose, à la vitesse supérieure !Lancer un mouvement unitaire, social et politique, citoyen de vaste ampleur avec une grève générale interprofessionnelle illimitée (un peu comme le comité LKP en Guadeloupe). C’est le seul moyen pour faire reculer le gouvernement Sarkozy-Fillon et le patronat !
Il nous faudra avoir des objectifs et débouchés sociaux concrets : L’urgence sociale est là !Objectifs : propositions anti crise et de rupture avec le capitalisme que je formule :
- hausse des salaires et notamment le SMIC à 1500 euros nets;- hausse des revenus de transferts (retraites, allocations chômage, allocations familiales, minima sociaux; une première étape avec un complément de 300 euros…);
- rétablir l’échelle mobile des salaires et une politique de revenus ;
- lancer un grand emprunt public pour l’alterdéveloppement et la solidarité nationale,
- instauration d’un salaire maximum ;
- abrogation du bouclier fiscal et de la loi Tepa ;
- blocage des prix des produits de première nécessité ;
- blocage sur deux ans des loyers ;
- réinvestissement dans l’emploi public et les services publics (Education, Hôpitaux, etc.. ) donc abrogation des directives et lois LOFP et RGPP,
- interdiction des licenciements boursiers ou des licenciement faits par des entreprises bénéficiaires, ou qui versent des stocks options à leurs dirigeants ou qui délocalisent ;
- reprise par des salariès associés ou des producteurs associés (formes de véritables coopératives) des entreprises qui déposent le bilan ou qui délocalisent. Cette reprise se fera avec l’aide d’un service bancaire public ;
- instaurer des droits nouveaux [et constitutionnels] pour les salariés dans l’entreprise, renforcement des pouvoirs des comités d’entreprise et des délégués du personnel avec droit de veto (fusions, acquisitions, délocalisations, ventes d’activités, licenciements, investissements, livres de compte…);
- abrogation du service minimum et des atteintes aux droits de grève;
- socialisation des bénéfices par leur intégration dans des réserves réglementaires gérées par un fonds mutualiste géré par les salariés, les pouvoirs publics, la souveraineté populaire.
- réappropriation collective et sociale des grands moyens de production , d’investissement et d’échanges notamment le secteur bancaire avec la création d’un véritable service public bancaire ;
- moratoire sur les prêts relais ;
- politique volontaire pour la création de logements sociaux ;
- réquisition des appartements vides et bureaux inoccupés;
- loi instaurant la propriété publique du foncier ;
- instaurer la planification écologique pour rompre avec le capitalisme et le productivisme. Une autre façon de produire, une autre façon de consommer, une autre façon de partager ;
- lancer des états généraux pour un nouveau processus constituant ;
- Au niveau européen aller vers une harmonisation fiscale et sociale avec la création, d’un SMIC dans chaque pays membre, la création de services publics européens, d’un bouclier douanier efficace pour éviter le dumping social et fiscal et imposer des normes sociales et environnementales aux frontières de l’Union.
Je m’arrête là. La liste de mes idées, de mes propositions n’est pas exhaustive…
Débouché politique :Il est clair que l’on ne peut plus attendre. Les gens sont dans une difficulté extrême. Attendre c’est désespérer et de guerre lasse les citoyens encaisseront les coups sans plus réagir. Il faut un débouché politique.
Les partis de Gauche doivent relayer et donner en perspectives au mouvement social un débouché politique. Un premier Front Populaire - le Front de Gauche -se fait jour avec le PCF, le PG, la GU, peut-être demain le MRC, les alternatifs. Ce front politique et citoyen est pour les élections européennes.
Je ne suis pas surpris par le refus du NPA de rentrer dans le Front de Gauche.Je trouve que la formulation de leur corpus idéologique (un coup révolutionnaire mais pas trop; un coup libertaire, un coup guévariste (là ça me fait rigoler… !), un coup libéral (refus de tout protectionnisme voire les propos de Sabato, un coup plan com dans tout les médias…) mais je ne veux pas insister sur la confusion qui règnent au NPA. Je souhaite que le Front de Gauche s’agrandisse et dynamise sa démarche.
Je propose que le Front de Gauche devienne le front qui permette au mouvement social en cours d’avoir un débouché politique à court et moyen terme.Nous devons envisager la réunion au niveau de chaque circonscription, de chaque commune, de chaque entreprise, d’un comité de mobilisation et d’insurrection civique, sociale, citoyenne, d’éducation populaire, qui lance ce vaste mouvement social, ces grèves illimitées, ce dynamisme politique citoyen pour enfin faire reculer le gouvernement Sarkozy-Fillon, le patronat et imposer les objectifs qui se sera donné (voir les objectifs de rupture avec le capitalisme et et propositions pour lutter contre la crise formulées ci-dessus).
J’espère que Jean-Luc Mélenchon, le Parti de Gauche, le Front de Gauche, vous tous ici,souscriront à ces propositions, ces objectifs. Nous devons agir concrètement pour redonner espoir à nos concitoyens et proposer autre chose que de subir la crise, les mauvais coups patronaux ou du gouvernement et leurs mépris, la faiblardisse syndicale et politique actuelle !
L’urgence sociale est là flagrante, criante ! L’urgence politique aussi !
Gilles FABRE
Vous avez bien raison de souligner le fossé entre d'une part l'attente sociale, la mobilisation massive, et d'autre part les réponses des directions syndicales en terme de journées d'action et l'absence de perspective politique. Il n'y a pas de débouché, car tout débouché nécessite une expression claire de rupture avec le capitalisme. Et les partis dont vous parlez ont un programme d'accompagnement, d'aménagement, mais pas de renversement. En conséquence, il faut prendre les questions comme elles se posent. S'il y a urgence dans la situation, il y a urgence dans les réponses appropriées. En existe t-il d'autre que celle formulée dans l'appel pour la défense de nos droits constitutionnels que nous avons été 200 à promouvoir, l'unité pour une grande marche à Paris par millions à l'assemblée nationale, pour l'interdiction des licenciements, le sauvetage de nos services publics, la santé, la sécurité sociale, l'éducation, etc..., l'irruption du peuple sur la scène de l'histoire pour faire entendre sa voix et faire peser sa volonté? Vous parlez de formations qui sont partisanes d'un front pour les élections européennes. Mais quel rapport avec la recherche d'une solution maintenant, sans attendre, à la crise du capitalisme que subissent des millions, toujours plus nombreux chaque jour... D'autant, mais cela est une autre question, que sur l'Europe le peuple a déjà voté. C'était le 29 mai 2005, en rejetant le projet de constitution que l'UMP et la direction du PS ont adopté au congrès quelques temps plus tard, dans un déni total de la souveraineté populaire.
J.C.