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Municipales 2008 : Tout est prêt pour la Bérézina

Par Jean-Paul Damaggio • Actualités • Vendredi 15/02/2008 • 0 commentaires  • Lu 1141 fois • Version imprimable


En 58 De Gaulle arrive au pouvoir et en 59, malgré un mode de scrutin modifié, c’est l’échec aux municipales. En 81 c’est enfin l’alternance mais en 83, malgré un mode de scrutin modifié, c’est l’échec aux municipales pour la gauche. En conséquence, après la victoire de Sarkozy en 2007, l’inévitable Bérézina de l’UMP en 2008 ne serait que la suite logique d’un effet structurel de la vie politique... d’autant qu’il n’a même pas modifié le mode de scrutin ! Vous le voyez, tout s’explique par avance ! Mais alors, la rupture, ça n’existe pas ? Et le débauchage de dirigeants du PS, ça ne change rien à l’effet structurel ? Sauf qu’ils vont se faire rare les socialistes à se porter au secours de Sarkozy. Même si le repli doit se produire en bon ordre, on sent monter le cri du « sauve qui peut ». Faut-il en conséquence revoir les analyses de partout, sur la puissance du sarkozysme ?

 

Quand Berlusconi arriva une première fois au pouvoir en Italie, même un esprit lucide comme Nanni Moretti annonça qu’il serait indéracinable. Or il n’acheva même pas sa législature pour laisser la place à la gauche. Elle-même ne put empêcher le retour de Berlusconi... jusqu’au gouvernement Prodi qui vient de devoir quitter la scène ! Sommes-nous dans le même cas de figure ? Ce serait confondre deux modes de scrutin dont l’un crée l’instabilité gouvernementale (Italie) et l’autre la stabilité qui permet souvent aux présidents de faire deux mandats. Car la Berezina n’est pas forcément Waterloo !

Le PS peut gagner le 9 et le 16 mars, comme il gagna aux régionales de 2004, sans rapprocher l’heure de l’alternative au sarkozysme. Pourquoi ? Mitterrand fut le seul à comprendre à la fois la crise sociale de son temps et la manipulation du système politique. Il osa l’alliance avec le PCF, repoussant ainsi le Centre dans les bras de la droite en pronostiquant qu’il marginaliserait ainsi son meilleur allié. Cette stratégie laissa le PS plus solitaire que jamais malgré l’invention de forces d’appoint plutôt louches sous la conduite de ministres comme Brice Lalonde (Génération Ecologie) et Bernard Tapie (avec le Parti radical de gauche). Aujourd’hui, la seule inconnue des élections municipales s’appelle MoDem ! Manifestement, le PS est tenté par un retour aux alliances centristes, le Conseil national du PCF ayant dernièrement refusé de sanctionner cette stratégie. Si le Modem écartelé réussit malgré tout une percée électorale, alors le PS va pouvoir continuer, en s’alliant avec lui, d’écraser la gauche de gauche, qui, malgré l’urgence, reste incapable de se donner la visibilité indispensable pour peser sur les orientations futures. Le nouveau parti en gestation dans les couloirs de la LCR ne fera que stériliser toujours plus des forces pourtant indispensables à la reconstruction d’une force authentiquement à gauche.

L’exemple de Toulouse risque d’être emblématique des impasses futures du PS, et ça ne serait malheureusement pas la première fois que la ville rose témoigne de cette myopie des socialistes, dans une région où pourtant ils sont toujours puissants. Explication de texte : les médias ne repèrent que trois listes calquées naturellement sur les trois géants de la présidentielle : UMP, MoDem, PS. Or, dans tous les sondages, la liste MoDem ne fait pas mieux que la liste alternative de François Simon et à peine mieux que celle de la LCR. La gauche de gauche (liste alternative plus liste LCR) pèse plus de 12% quand le MoDem tourne au mieux à 6% ce qui s’explique par le fait que des candidats centristes sont aussi avec l’UMP et le PS.

La gauche de gauche risque de gagner électoralement sans pouvoir gagner institutionnellement, si le PS refuse au second tour toute alliance avec la liste alternative (la LCR nationale a toujours refusé des accords avec le PS même si localement elle laisse entendre que des ententes techniques sont possibles sans donner de sens clair à cette formule creuse). Le PS pense que l’électorat de gauche sera contraint de soutenir le PS pour battre la droite, tandis que l’électorat centriste pouvant se reporter sur la droite, une alliance avec le Modem est l’assurance de la victoire. Or, l’exemple politique italien (indépendant de l’exemple électoral) démontre que la course au centre fait finalement le jeu de Berlusconi, comme elle fera ici le jeu de Sarkozy. Voilà comment j’en reviens au thème de cette chronique : c’est le PS qui va offrir à l’UMP une planche de salut, non plus par les transfuges, mais par sa politique elle-même (l’exemple du vote TCE est démonstratif), et dans ce naufrage, la responsabilité du PCF ou des Verts sera entière. Je ne dis rien de la responsabilité du PRG car cette situation lui convient parfaitement.

Comment expliquer aux électeurs toulousains, et à d’autres dans de multiples villes de France, que l’enjeu des municipales 2008 ce n’est pas la défaite de Sarkozy ou la victoire du PS, mais, là où ils le peuvent, c’est de peser très fort pour que la Berezina se change en Waterloo pour l’UMP et le PS tenté par la course au centre ? Le score de la LCR sera un témoignage important de la critique radicale du système, il ne sera pas un moyen de peser sur le PS. La forte présence de Besancenot dans les médias tient à son score à la présidentielle mais ce score est le même que celui de 2002 et entre 2002 et 2008, en quoi le rapport des forces est-il devenu plus favorable aux salariés avec une LCR à 4% ? La force qui doit émerger pour peser sur le PS a besoin de faire preuve de son autonomie politique (en étant présente au premier tour) et de sa détermination à intervenir dans la gestion (par de justes négociations de second tour). En sachant, pour tenir compte des leçons du passé, que cette autonomie n’est pas négociable.

15-02-2008 Jean-Paul Damaggio


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