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Le capitalisme a-t-il un avenir?

Par Denis Collin • Bibliothèque • Dimanche 21/12/2014 • 1 commentaire  • Lu 5658 fois • Version imprimable


Sous ce titre, Immanuel Wallerstein, Randall Collins, Michael Mann, Georgi Derluguian et Craig Calhoun publient cinq essais qui tentent de répondre de scruter l’avenir du mode de production capitaliste vieux de quatre ou cinq siècles. Il s’agit d’explorer les perspectives à l’horizon de quelques décennies en s’appuyant sur la sociologie historique, sur les traditions de , Weber ou Braudel – Wallerstein, théoricien de « l’économie-monde » est un disciple de Fernand Braudel. Les auteurs divergent et sur l’analyse des facteurs à prendre en compte et sur les perspectives. Les deux premiers (Wallerstein et Collins) estiment que le capitalisme est condamné à l’horizon de 30 ou 40 ans. Wallerstein appuie son analyse sur l’impossibilité d’une accumulation illimitée du capital et l’épuisement des ressources dont le capitalisme a pu se servir pour résoudre ses crises antérieures. Collins souligne le rôle central de l’innovation technologique qui devrait entraîner la disparition des couches moyennes intellectuelles – dans les secteurs comme l’informatique ou les services financiers – la dernière vague de destruction avait touché l’emploi industriel traditionnel, comme la sidérurgie ou l’automobile, la prochaine destruction touchera la « high tech » précisément en raison des progrès technologiques. Signalons dans l’essai de Collins la mise en pièces très convaincante des bavardages idéologiques sur la société de la connaissance (cf. annexe).  Sur quoi débouchera cet effondrement du capitalisme ? Toute prédiction est évidemment impossible puisque l’issue dépend des actions humaines, mais comme le dit Wallerstein, il y a au moins une chance sur deux que s’installe une société plus égalitaire et plus démocratique.

 

Les trois derniers auteurs sont beaucoup moins catégoriques. S’ils s’accordent pour considérer que les perspectives sont assez sombres, ils se refusent à en tirer des conclusions aussi catégoriques. Ils insistent sur les différences de point de vue : la stagnation du capitalisme vue d’Europe semble évidente mais elle l’est beaucoup moins vue de Chine ! Il reste que des crises multiples peuvent se combiner et déboucher sur une catastrophe. Les questions géopolitiques ou les facteurs comme la crise climatique sont particulièrement pris en compte. On notera l’analyse assez originale et bien informée de « ce qu’était le communisme » développée par Georgi Derluguian.

L’ensemble de l’ouvrage et plutôt stimulant. Je suis évidemment plus proche des thèses de Wallerstein et Collins dont je partage le pronostic, en partie pour les mêmes raisons qu’eux et en partie pour d’autres raisons, notamment à partir de l’analyse de la démographie dont ils ne tiennent pas assez compte. Je partage aussi bien évidemment leur idée selon laquelle l’effondrement inévitable du capitalisme n’ouvrira pas automatiquement la voie à un socialisme démocratique et que par conséquent la prospective historique doit être seulement une incitation à œuvrer pour préparer un avenir humain qui suppose que soit ressaisie la question de l’action politique et du pouvoir étatique.

En effet, quelle que soit leur approche, les cinq auteurs s’accordent sur l’impossibilité du grand automate « marché » à continuer de fonctionner. Un des capitalismes possibles serait un capitalisme autoritaire étroitement lié à un appareil d’État fort, sur le modèle chinois. Le fin de l’hégémonie des États-Unis semble en tout cas inéluctable et un monde soumis à la concurrence de plusieurs hégémons sera un monde encore plus dangereux.

Bref, ce livre collectif, sa manière et en s’appuyant sur le meilleur de l’analyse sociologique et historique, reformule l’alternative que Rosa Luxemburg annonçait au début du XXe siècle : « Socialisme ou barbarie ». De la première guerre mondiale au nazisme, le pronostic de Rosa a été amplement confirmé, même si c’est surtout négativement. La crise historique du capitalisme au XXIe siècle, crise qui est devant nous inéluctablement nous place devant la même angoissante question, mais à une échelle encore plus élargie.

Bonnes feuilles

Collins et la société de la connaissance (extrait de Emploi et classes moyennes, la fin des échappatoires)

Cinquième échappatoire : l’inflation des diplômes, et autres formes de keynésianisme masqué

On désigne par le terme d’inflation des diplômes l’augmentation du niveau de formation exigé des candidats à un emploi qui accompagne la proportion croissante de la population ayant fait des études supérieures. Plus le nombre d’étudiants accédant à un titre ou à un diplôme est élevé, plus sa valeur décline, ce qui incite ces derniers à prolonger leurs années d’étude. Aux États-Unis, les diplômes délivrés pas l’école secondaire (le niveau bac) étaient relativement rares avant la Seconde Guerre mondiale ; ils sont aujourd’hui tellement banals qu’ils n’ont plus aucune valeur sur le marché du travail. Ce sont désormais plus de 60 % des jeunes d’une même cohorte qui fréquentent l’université, dont les diplômes sont en train de subir le même sort que le baccalauréat hier. Il s’agit d’une tendance mondiale ; en Corée du Sud, 80 % des bacheliers entrent à l’université. Leurs diplômes dévalués servent essentiellement à une chose : gonfler le marché de l’éducation à travers une escalade de la demande de diplômes de niveau toujours plus élevé. A priori, il s’agit d’une dynamique sans fin, qui pourrait fort bien finir par déboucher sur une situation semblable à celle de la caste des mandarins chinois pendant les dynasties impériales tardives’, lorsque les candidats continuaient à passer des examens à l’âge de trente ou quarante ans ; sauf qu’aujourd’hui cette situation n’affecterait pas simplement une petite élite, mais la grande majorité de la population. Historiquement, certains pays ont déjà connu divers taux d’inflation des diplômes, mais à partir de la seconde moitié du XXe siècle tous ont fini par être entraînés sur cette voie’.

Les diplômes sont une sorte de monnaie qui exprime la respectabilité sociale et que l’on échange contre des emplois ; comme dans tout phénomène de type monétaire, il y a inflation (ou diminution du pouvoir d’achat) lorsqu’une augmentation autonome de la masse monétaire rencontre un stock limité de produits. En l’occurrence, le stock en question est défini par un marché de plus en plus compétitif des emplois destinés aux couches moyennes supérieures. L’inflation des diplômes est autoalimentée ; du point de vue de l’étudiant individuel, la meilleure réponse à la valeur déclinante des diplômes est d’acquérir encore plus de diplômes. Plus il y a de diplômés du supérieur, plus forte est la concurrence pour l’emploi entre eux, et plus les employeurs peuvent se montrer exigeants en matière de niveau éducatif. D’où des formations encore plus longues, une concurrence encore plus vive et une inflation des diplômes encore plus aiguë.

Dans le contexte global de cette dynamique inflationniste, le segment le plus instruit de la population monopolise une portion de plus en plus substantielle du revenu, c’est du moins ce qui s’est passé aux États-Unis depuis les années 1980. Il faut toutefois se garder d’extrapoler en faisant de cette phase historique spécifique un modèle immuable en tout temps et en tout lieu. Les principaux bénéficiaires de cette compétition éducative inflationniste ont profité de plusieurs processus : a) leurs secteurs d’activité sont restés relativement protégés dans la mesure où, jusqu’à présent, le chômage technologique n’affectait avant tout que la dernière génération de travailleurs manuels correctement rémunérés, puis les échelons inférieurs du salariat en col blanc ; b) apparemment, le fossé entre la qualité de la performance respective des salariés issus des différents niveaux de la hiérarchie éducative s’est élargi. On n’insiste pas suffisamment sur le fait que la spirale inflationniste en matière d’éducation a engendré une frustration croissante et des performances médiocres chez les étudiants qui ne sont pas en tête du peloton mais sont quand même obligés de suivre des formations toujours plus longues sans pour autant avoir de chances d’accéder aux emplois d’élite. L’inflation des diplômes et la baisse des critères de sélection sont des symptômes de ce processus. Si l’on en croit les recherches ethnographiques sur les adolescents, les sous-cultures juvéniles et en particulier les gangs de jeunes, il semble bien que le développement de la scolarisation ait engendré une distanciation croissante entre la jeunesse et les normes officielles de l’univers adulte. Les premiers gangs juvéniles sont apparus au début des années 1950, lorsque, pour la première fois, les enfants de la classe ouvrière ont été contraints de rester à l’école plutôt que d’entrer dans la vie active ; l’idéologie de ces bandes était explicitement hostile à l’école. Telle est la source de la culture oppositionnelle juvénile qui est si répandue aujourd’hui, tant parmi la minorité appartenant vraiment à des gangs qu’au sein des couches majoritaires qui miment l’attitude rebelle de cette dernière. De nos jours, les employeurs se plaignent du fait qu’il est de plus en plus difficile de trouver des candidats fiables et consciencieux pour occuper les postes les moins qualifiés dans le secteur des services. Mais le problème n’est pas tant que l’enseignement secondaire de masse ne fournirait pas les compétences techniques adéquates (on n’a pas vraiment besoin d’avoir le niveau bac en maths et en sciences pour saluer des clients poliment ou expédier des colis à la bonne adresse) ; tout simplement, les jeunes répugnent à exécuter ce genre de travaux subalternes. Le système scolaire massifié et sa logique inflationniste prétendent fournir aux étudiants une voie d’accès aux emplois d’élite mais, en réalité, ils les abandonnent pour la plupart à un marché du travail où ce ne sont justement que des emplois subalternes qui sont disponibles — à moins que vous ne soyez plus brillant que 80 % de vos camarades de classe. Pas étonnant que les jeunes soient profondément frustrés.

Bien que l’inflation des diplômes soit le principal moteur de l’expansion du système éducatif, la reconnaissance explicite de ce processus est soumise à un mécanisme de refoulement quasi freudien. En l’occurrence, l’agent d’idéalisation et de répression, l’équivalent scolaire du Surmoi, est l’idéologie technocratique dominante. D’après ses thuriféraires, les caractéristiques techniques de plus en plus exigeantes des emplois disponibles tendent à expulser le travail non qualifié, et les emplois hautement qualifiés d’aujourd’hui requièrent une augmentation constante des niveaux de formation. Il y a plus de trente ans, dans The Credential Society, j’ai rassemblé des éléments de preuve démontrant que la demande de diplômes de plus en plus élevés n’était nullement produite par l’évolution technologique. Ce n’est pas essentiellement la demande technologique qui oriente le contenu de l’éducation, vu que la plupart des compétences techniques — même les plus avancées — s’acquièrent sur le tas ou à travers des réseaux informels et que, au mieux, les bureaucraties de l’éducation s’efforcent de standardiser des compétences ayant émergé ailleurs. Au terme d’une recherche plus récente sur la relation entre inflation des diplômes et évolution technologique, je n’ai rien découvert qui m’amène à réviser les conclusions publiées en 1979. Il est vrai qu’une petite proportion des emplois bénéficie de l’enseignement scientifique et technique, mais ce secteur minoritaire n’est pas le moteur de l’expansion massive de l’éducation. On imagine difficilement qu’à l’avenir presque tous les travailleurs puissent être des scientifiques ou des techniciens qualifiés. En réalité, ce sont les emplois de services peu qualifiés qui croissent le plus dans les pays riches, à savoir les secteurs où il revient moins cher d’embaucher du personnel que d’automatiser. Aux États-Unis, actuellement, l’un des secteurs les plus créateurs d’emplois est celui du tatouage, où de petites entreprises emploient des salariés sans diplôme et faiblement rémunérés, ce qui les soustrait pour l’instant au contrôle des grandes firmes. Et  ce que vendent ces entreprises, ce sont justement des symboles de rébellion contre la culture dominante.

Bien que cette tendance à l’inflation des diplômes repose sur des prémisses erronées — l’idée que plus d’éducation engendrera plus d’égalité d’opportunités, plus de performances économiques à forte valeur technologique ajoutée et plus d’emplois de qualité —, elle offre toutefois un semblant de solution au chômage technologique de la classe moyenne. L’inflation des diplômes contribue à absorber la main-d’œuvre excédentaire en soustrayant un nombre croissant d’individus à la population active. En outre, lorsque la formation de cette masse d’étudiants est de fait subventionnée, soit directement, soit indirectement en vertu du coût peu élevé des crédits qui leur sont accordés (et qui ne seront sans doute jamais remboursés), on peut considérer qu’il s’agit d’une forme de transferts sociaux masqués. Dans les pays où l’État-providence est idéologiquement impopulaire, le mythe de l’éducation universelle alimente de fait un État-providence clandestin. Ajoutons à cela les millions d’enseignants du primaire, du secondaire et du supérieur, plus le personnel administratif, et on peut aller jusqu’à dire que c’est le keynésianisme caché encouragé par l’inflation éducative qui maintient pratiquement l’économie capitaliste à flot.

Aussi longtemps que le système éducatif continuera à être financé d’une manière ou d’une autre, il fonctionnera en effet comme une forme de keynésianisme masqué, une espèce de substitut de stimulus économique. Cette politique sociale qui ne dit pas son nom est un peu l’équivalent des programmes du New Deal qui mettaient les chômeurs au travail en leur faisant exécuter des peintures murales dans les bureaux de poste ou participer à des campagnes de reforestation. Si l’expansion de l’éducation est pratiquement la seule forme légitime et acceptée de politique économique de type keynésien, c’est justement parce qu’elle n’est pas ouvertement reconnue comme telle. Elle avance sous la bannière de la méritocratie et de la technologie de pointe : c’est le progrès technique qui est censé exiger une main-d’œuvre toujours plus instruite. Il y a un élément de vérité dans cette idée, sauf qu’elle interprète le processus réel à l’envers : c’est en fait le chômage technologique qui fait de l’école un lieu de refuge pour tous ceux qui fuient un marché du travail toujours plus exigu, bien que personne ne veuille le reconnaître. Mais peu importe : tant que le nombre de victimes du chômage sera compensé par le nombre d’étudiants, le système pourra survivre.

Économie et astrologie (extrait de la conclusion commune)

À l'opposé, une bonne partie du champ des sciences sociales est tombé sous la domination de l'économie néoclassique et de ses imitateurs formalistes dans d'autres disciplines. Les causes structurelles de cette situation ne sont guère différentes de celles qui expliquent l'influence qu'a pu jadis avoir l'astrologie, et on pourrait sans doute les traiter par une bonne dose de parodie à la Swift. L'astrologie était alors, tout comme l'économie de nos jours, une forme d'expertise reconnue. Elle jouissait de la confiance des élites dirigeantes dans pratiquement toutes les civilisations, en Occident comme en Orient. Les astrologues étaient très bien payés précisément parce que les experts qui interviennent dans les domaines marqués par le plus haut degré d'incertitude et d'anxiété humaines sont souvent les mieux rémunérés. Au sein de structures politiques impériales et féo­dales fondées sur le contrôle familial de la rente, les élites étaient particulièrement obsédées par le problème de la succession dynastique et par de possibles revers de fortune sur les champs de bataille. De façon similaire, les angoisses des capitalistes sont liées au caractère incertain des décisions d'investissement, à la volatilité des marchés et à l'hostilité sociale que leurs activités sont susceptibles d'engendrer. Tout comme l'économie néoclas­sique, l'astrologie fonctionnait comme une discipline idéolo­gique conforme au sens commun des classes dominantes de son époque. Mais à son apogée, elle était plus qu'un simple reflet de l'idéologie des élites : elle se présentait comme une discipline hautement mathématisée reposant sur une accumulation sécu­laire d'observations empiriques qui deviendront la base de l'astronomie moderne. Étant donné que ses prévisions concrètes ne tombaient juste qu'à peu près une fois sur deux, elles étaient subtilement corrigées par l'intuition et le flair poli­tique de ses praticiens. Pour réussir, un astrologue devait aussi être un courtisan habile. Il en va largement de même aujourd'hui des conseillers économiques et des économistes qui travaillent pour les gouvernements.

En temps de crise et de polarisation politique, les économistes et les politologues auront de nombreuses occasions d'innover. Il y aura de nouveaux terrains de recherche inédits, portant par exemple sur la possibilité de formes alternatives d'organisation des marchés. Le mépris des potentialités du marché est une erreur théorique et pratique majeure des mouvements de gauche du xx' siècle. Pour notre part, nous avons un profond respect pour l'héritage intellectuel de Joseph Schumpeter. Mais comment se concrétisera dans le futur sa théorie du dynamisme entrepreneurial ? Quelle couche ou quelle fonction sociale assu­mera le rôle de l'innovation entrepreneuriale, y compris au- delà de la crise du capitalisme ? Est-il possible d'exploiter les énergies entrepreneuriales de façon moins destructrice et dans le sens d'une plus grande créativité ?

Nous prenons également très au sérieux l'idée chère à Karl Polanyi de « marchandises fictives », à savoir la terre, l'argent et la vie humaine, qui ne peuvent pas être échangées sur le marché. Au XXIe siècle, la notion de « terre » recouvre globale­ment celle d'environnement naturel, celle d'« argent » désigne la finance mondiale et celle de « vie humaine » évoque l'inter­nationalisation des coûts de reproduction sociale par le biais d'un financement public de prestations sociales abordables et de bonne qualité en matière de santé, d'éducation, de logement et de retraite, sans parler de la sécurité matérielle de la vie urbaine. Est-il possible d'imaginer une économie postcapitaliste mondiale articulée en divers secteurs fonctionnant sur la base de principes différents : priorité à la reproduction sociale dans le secteur des services publics au sens large et priorité à l'efficacité marchande dans le secteur des biens et services de consomma­tion ? En outre, il n'y a pas de raison pour qu'un système écono­mique post-capitaliste soit statique. Il est possible qu'on assiste à l'avenir à des retours périodiques à une économie de marché avec un degré plus ou moins grand de propriété privée. On peut imaginer un mouvement de balancier entre dispositifs capita­listes et non capitalistes de gestion de l'économie. C'est quelque chose qu'il faudra prendre en compte.

L'aversion envers le pouvoir de contrôle de l'État n'est pas moins nuisible politiquement que l'aversion envers les rapports marchands. Ce n'est pas un hasard si la restauration néoconser­vatrice des dernières décennies du xx' siècle, dans le sillage de la crise des gauches politiques, a reposé sur une érosion perma­nente du pouvoir de l'État sous l'effet de la dérégulation et de la mondialisation. Les capitalistes ont manifesté une méfiance de plus en plus grande à l'égard du « Big Government », craignant à juste titre que l'État moderne tombe entre les mains des classes populaires — que ce soit par le biais d'élections démocratiques, de mouvements insurrectionnels, ou d'une combinaison des deux — et qu'il soit utilisé à des fins non capitalistes de régula­tion du marché et de redistribution sociale. Dans la période immédiatement postérieure à la guerre, un État-providence de grande envergure pouvait plus ou moins être toléré au bénéfice du maintien de la paix. Mais, à partir des années 1970, nom­breux sont les capitalistes, en particulier aux États-Unis, qui se sont sentis aiguillonnés par la perspective de vaincre la gauche et de revenir sur les compromis d'après-guerre. Reste une question théorique majeure : l'État bureaucratique moderne est-il susceptible de jouer un rôle positif, négatif, ou nul, dans la conduite des affaires publiques en pleine phase de crise et de transformation systémique imminente ? Cette inconnue se sub­divise elle-même en de nombreuses questions subalternes, pro­blèmes pratiques et paradoxes théoriques qui restent à analyser. Seul un effort intellectuel considérable des sciences sociales per­mettra de relever ces défis.

Immanuel Wallerstein, Randall Collins, Michael Mann, Georgi Derlugian, Craig Calhoun: Le capitalisme a-t-il un avenir? , Éditions La découverte, collection L'horizon des possibles, 2014, 20€

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Lien croisé par Anonyme le Lundi 25/05/2015 à 23:09

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