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La revue la Sociale propose de travailler à des états généraux de refondation de l’instruction publique,

par Robert Duguet

Par la-sociale • Actualités • Mercredi 07/09/2016 • 1 commentaire  • Lu 1948 fois • Version imprimable


 Nous reprenons ici la réaction de Robert Duguet à notre proposition d'états généraux. Tous ceux de nos lecteurs qui veulent intervenir sur le sujet et proposer leur contribution ou leur témoignage seront les bienvenus.


L’initiative de la revue proposant des états généraux pour la refondation de l’instruction publique me parle sérieusement : je ne sais pas, cher Denis Collin, si nous arriverons dans la situation actuelle à réaliser une telle initiative, ce que je sais c’est qu’il faut faire quelque chose.

Notre génération, celle qui a eu 20 ans en 1968, qui a forgé sa pensée théorique dans le trotskysme de la décennie 1970-1980, a subi avec la montée au pouvoir de François Mitterand et du parti d’Epinay une défaite majeure. Dès les lendemains de l’élection présidentielle de mai 1981, les attaques contre l’enseignement public vont redoubler en intensité : la « gauche » ouvre les écluses et accentue les réformes réactionnaires de démolition de l’école que la droite ne parvenait pas à faire passer. Le rapport Legrand de réforme des collèges centré déjà sur le projet d’établissement particulariste et l’interdisciplinarité n’était déjà pas autre chose que le brouet infâme que nous sert aujourd’hui la politique de Najat Vallaud-Belkacem. Aux réformes réactionnaires du collège (Legrand) et du lycée (rapport Prost) se joint l’offensive antilaïque de la loi Savary qui converge avec la défaite du camp laïque en 1984. En 1982 la hiérarchie catholique par la voix de monseigneur Lustiger salue la loi de décentralisation administrative, dite loi Defferre, qu’elle déclare conforme au principe de subsidiarité de l’église catholique. Les défenseurs de l’enseignement public que nous sommes, qui nous définissons d’abord comme laïques, c’est-à-dire attachés à un système d’organisation politique de la cité, indépendant de toute emprise religieuse ou communautaire sur l’école et l’état, avons subi une défaite majeure dont nous ne sommes pas encore aujourd’hui relevés. C’est sous le mitterandisme que tout le réseau laïque organisé autour du CNAL et de la défunte FEN sera délibérément démoli : le parti d’Epinay, construit sur l’alliance entre les restes de la SFIO d’un côté et les secteurs venus de la gauche de l’église catholique (Vie Nouvelle, ACO…), et les cadres syndicaux essentiellement de la CFDT, accomplira son véritable projet, dont on peut juger aujourd’hui des résultats. L’affaire venait de loin : en 1972 le colloque du CNAL, qui voit la CFDT et plusieurs organisations de la gauche de l’église entrer dans le cartel d’organisations le soutenant, prend une position qui tourne en fait le dos au mot d’ordre de 1960 « fonds publics à école publique, fonds privée à école privée ! » Le mot d’ordre de nationalisation laïque de l’enseignement c’est déjà le projet de service unifié laïque de la loi Savary, qui définit le projet religieux ou privé comme concourant au service public.

Je pense qu’à la question de la refondation de l’instruction publique est liée la question de la laïcité de l’école et de l’Etat. Cette discussion a eu lieu dans les années 1980, des intellectuels ont écrit des livres en défense de l’enseignement public, de la construction du citoyen qu’il permet, de la liberté absolue de conscience, de la laïcité. Sommes-nous dans une situation où nous pouvons panser les blessures et repartir au combat ? Je le souhaiterais. En tout cas cela mérite discussion.

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Commentaires

réinventer l'école par Meens Philippe le Vendredi 18/01/2019 à 21:50

 

Depuis que l'on a supprimé les "humanités" dans l'enseignement, l'Homme s'est déshumanisé. macron et toute les "élites" de notre pays en sont un tragique exemple. Ils sont les rejetons parfois brillants, souvent très "intelligents" d'une éducation nationale rigide qui a fait de la sélection un dogme, du formatage une méthode : L'élève doit être conforme au modèle de société capitaliste.

Extraits du livre " Libérez votre cerveau !" de Idriss Aberkane  ( éditions Pocket )

"René Guénon a dit que nous étions dans le "règne de la quantité" : Nous sommes incapables d'évaluer la qualité des choses, alors nous nous conditionnons à ne voir que les quantités, des notes, même lorsqu'elles sont fausses ou hors sujet.

La vie notée est à la vraie vie ce que le cheval de bois est au vrai cheval.

On nous a fait croire que la vraie vie ( professionnelle, scientifique,...) ne pouvait plus exister sans la vie notée. C'est pourquoi un scientifique doit passer son temps à surveiller sa note dans les classements de citation, sans quoi il n'existe pas !

La vie réelle peut contenir la vie notée, la vie notée ne peut pas contenir la vie réelle. La première est plus ancienne, plus vénérable, plus vraie et plus noble que l'autre, qui a fait sur elle un coup d'état. Quiconque critique ce coup d'état s'expose à des punitions redoutables.

Si vous limitez votre vie à la vie notée, vous aurez vendu un vrai cheval pour acheter un cheval de bois. Pire, vous transmettrez ce cheval de bois à vos enfants. L'Homme noté est inférieur à l'Homme tout court.

A l'école, on nous apprend que la conformité est la vertu suprême et cela dure toute notre vie, en particulier dans le monde universitaire où la conformité est la plus sacrée des vertus : Le millefeuille des commissions, des évaluations, et de l'imprimatur, de l'article à la carrière, en passant par le financement, est là pour y veiller. Or, dans la vraie vie, "plus vous essayez de rentrer dans le moule, plus vous allez ressembler à une tarte". Réussir sa vie, c'est en prendre le contrôle, c'est assumer son identité, mettre en valeur sa spécificité plutôt que de la brider. Assumer sa rondeur quand les trous de la sélection humaine sont carrés, puisque c'est la sélection naturelle qui a validé notre différence. Toute sélection qui n'est pas naturelle est un eugénisme.

Mais le pire de tous les mensonges véhiculés par la vie notée, c'est celui-ci : pour les choses importantes, le succès et l'échec sont individuels. Pour les choses sans importance, en revanche, ils peuvent être collectifs. C'est un mensonge absolu. De la chasse au mammouth au débarquement en Normandie, en passant par la construction des pyramides, toutes les choses qui changent le monde sont des succès ou des échecs collectifs... Ce sont des hommes fièrement scolarisés, persuadés de leur valeur individuelle, qui ont commis sans broncher les plus faramineuses atrocités sur terre, preuve que l'excellence scolaire échoue à sélectionner la bonté et l'humanité.

Dans la vraie vie, l'humanité crée une diversité de pensées, de pratiques, de méthodes, d'esprit. Dans la vie notée, l'école dit : " Hors de ma mesure, point de salut"...

L'école est une colonne de décantation qui crée des classes, et c'est pour cela qu'elle ne peut pas satisfaire tout le monde : Il est inscrit dans son cahier des charges qu'elle doit décevoir ses usagers et, par principe, décevoir l'Homme plutôt que l'Usine qui est son client final. Pour changer l'école, il suffirait d'admettre que c'est l'Humain le client, pas le Système.

"L'enfant n'est pas un vase que l'on remplit mais un feu qu'on allume" a dit Montaigne dans ses "Essais", une sapience totalement oubliée dans l'école d'aujourd'hui. L'heure n'est plus à l'éducation de stocks mais à l'éducation de flux, c'est à la dynamique d'apprentissage qu'il faut s'intéresser, pas au stock de savoirs. Il faut rendre nos enfants gourmands de savoirs. "




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