S'identifier - S'inscrire - Contact

Nicolas Sarkozy scelle la fin de la France

Soutenu par les héritiers de Francois Mitterrand,

Par Pierre Delvaux • Actualités • Dimanche 12/04/2009 • 2 commentaires  • Lu 2791 fois • Version imprimable


Toute proportion gardée, la situation actuelle de la France me rappelle celle de la Gaule à la fin du bas-empire romain. Face à la poussée des peuples eurasiens, Rome avait besoin d’hommes d’Etat intelligents et intègres, puisant dans l’observation et dans leur connaissance de l’Histoire des stratégies adaptées et s’assurant du respect et de la cohésion du peuple par leur honnêteté et leur propre respect des lois héritées de la Rome républicaine. Mais au fil des siècles, coupés de leur peuple, obnubilés par leur pouvoir personnel et par leurs rivaux à Rome, les empereurs dilapidèrent leur patrimoine en achetant la supposée protection de rois barbares qui finirent par les supplanter. A la fin du XXe siècle, pendant trois décennies, la France sut s’affranchir des grands blocs qui l’entouraient. Mais de même que Romulus Augustule (1) n’était pas Auguste, Nicolas Sarkozy n’est pas De Gaulle. Et il vient de nous faire basculer dans une situation de dépendance et, même, de soumission dont les conséquences risquent de nous coûter extrêmement cher. 

OTAN : la France désarmée, soumise et bientôt menacée

A l’occasion des sommets du G 20 et de l’OTAN, nous avons tous pu voir ces pathétiques images de notre président jouant des coudes et des épaules pour être filmé près du nouveau maître du monde. Cela prêterait à rire s’il ne s’agissait que de relations publiques mais le comportement physique correspond malheureusement ici au choix politique. Et ce comportement, l’actuel président de la république française ne le pratique pas seulement avec le dirigeant américain. Après s’être exhibé dans le 4x4 de Vladimir Poutine, après avoir fièrement entériné l’annexion d’une partie de la Georgie par le même, après avoir fait amende honorable auprès des oligarques post-maoïste de Pékin, Nicolas Sarkozy vient de nous placer sous tutelle stratégique américaine en réintégrant complètement l’OTAN. Si on complète ce tableau par les choix de politique de défense qui nous privent progressivement des moyens de dissuasion au profit d’unités anti-terroristes et anti-émeutes, nous avons les plus sérieux motifs d’être inquiets sur le devenir de la France. L’irresponsable renoncement au rang que De Gaulle avait réussi à donner à la France sur l’échiquier mondial ouvre la porte aux pires scénarios. D’autant que l’Europe ne semble pas être une priorité pour le président Obama. Plusieurs signes indiquent qu’il pourrait bien être tenté de l’abandonner au néo-impérialisme poutinien en échange de la soit-disant aide de la Russie par rapport à l’Iran et à l’Afghanistan (je renvoie à mon article intitulé « Gouvernance, guerre ou Nation » dans la rubrique « Internationale » )(2).

À l’origine :  la revanche de Mitterrand sur De Gaulle

Mais sur les choix stratégiques comme sur l’économie, il serait malhonnête de tenir l’actuel président de la république comme seul responsable. Si Nicolas Sarkozy a inauguré récemment une base militaire stratégique à l’entrée du golfe persique, n’oublions pas qu’en 1990, dans une formule où se mêle ivresse du pouvoir et fascination guerrière, François Mitterrand nous avait annoncé que « les armes »allaient « parler » dans ce golfe cher aux pétroliers américains. Et ce fut malheureusement le cas. En 1999, c’est l’un des « fils préférés » du précédent, Lionel Jospin (encore un qui se réclame sournoisement de l’internationalisme…), qui décida des honteux bombardements de la Serbie. Chacun peut aujourd’hui réaliser que la fameuse « Europe de la défense » n’était en réalité que le faux-nez de la stratégie atlantiste, du retour dans le giron militaire américain alors même qu’Obama semble attendre des services de notre part sans nous garantir en retour la moindre protection ! Là encore, Mitterrand fut l’initiateur et Sarkozy le finisseur.

G 20 : un poker menteur médiatique à destination des masses

Pour l’essentiel, le sommet du G 20 s’est résumé à l’établissement de trois listes blanche, grise et noire par l’OCDE en fonction de l’attitude de chaque pays par rapport aux paradis fiscaux. Pour faire quoi ? Le G20 s’est fixé l’objectif d’interdire aux grandes organisations internationales d’y placer des fonds. Attendons donc de voir cela. Mais, comme le faisait remarquer Le Monde (04.04.09), les traders de la City sourient gentiment de ces annonces. A commencer par le grand bruit fait autour de la participation de la Chine à ce plan. On a fait semblant de se réjouir que la Chine accepte la publication d’une liste noire de paradis fiscaux tout en le faisant sous l’égide d’une organisation dont elle ne fait pas partie (l’OCDE), ce qui ne l’engage donc en rien ! Singapour, Hongkong et Macao ont encore de beaux jours devant elles ! Ce qui n’a pas empêché notre Président-banane de triompher : « C’est la première fois que la Chine accepte de faire référence à une organisation dont elle ne fait pas partie !... »

Autre point fort : la reprise du cycle du Doha annoncée comme une grande victoire de ce G 20. Victoire pour qui ? Certainement pas pour nos agriculteurs ni pour nos ouvriers puisqu’il s’agit de conclure la libéralisation totale des échanges dans le monde entier. Autrement dit, d’imposer partout le dumping fiscal et social. Pendant ce temps, la BCE dont tout le monde attendait qu’elle baisse vigoureusement ses taux (au moins d’un demi-point ou, mieux,  jusqu’à  zéro comme l’a fait la Réserve Fédérale américaine) ne concédait qu’un malheureux quart de point , se justifiant encore une fois au nom de la lutte contre les déficits (« Nous avons une proportion de dépenses rapportées au PIB bien plus élevée en Europe qu’aux Etats-Unis » Jean-Claude Trichet)

Quant à la lune de miel Merkel-Sarkozy brodée par nos media hexagonaux, personne n’y croit une seconde ni dans les chancelleries ni dans les places boursières. La chancelière ne veut pas entendre parler d’un plan de relance européen, elle réfute la transformation de l’OTAN en organisation mondiale et souhaite visiblement en finir avec les mission supplétives en Afghanistan. Entre son image et les intérêts nationaux de l’Allemagne, Mme Merkel a fait un choix de chef d’Etat.

La crise fait carburer l’UMPS

A l’inverse, partageant avec Nicolas Sarkozy le même rêve de dissolution de la France dans un empire européen, le PS et ses obligés lui ont une nouvelle fois apporté leur soutien. Soutien franchement assumé pour le PS, Martine Aubry ayant déclaré le 6 avril : « Le sommet du G 20  est un pas heureux vers un certain multilatéralisme et vers une prise de conscience des excès du libéralisme financier (…) Ce n’est que le début d’un processus, il faut agir autant sur les règles financières que sur le plan économique (…) La restriction des hautes rémunérations et des bonus a été signifiée et mise en exergue dans les conclusions du rapport (…) Nous demandons à Nicolas Sarkozy (…) de faire voter par les députés une proposition de loi que les socialistes déposent et qui sera discutée le 30 avril qui permet pendant cette période de crise la suppression des bonus et hautes rémunérations pour l’ensemble des entreprises qui ont été aidées par l’Etat. » » Le Président de la république n’en demandait pas tant. Alors qu’il laisse les actionnaires envoyer sur le pavé des milliers de salariés, son « opposition » en rajoute une couche sur l’enfumage médiatique autour des « bonus » (boni serait plus correct). En pleine crise, en pleine destruction industrielle, le summum de la politique sociale à droite comme à gauche c’est de réclamer au patronat une apparence de décence morale ! OK, vous délocalisez, vous fermez, vous licenciez mais, s’il-vous-plait, faites un petit geste symbolique. Dans la casse sociale de masse, tenue correcte exigée !...

François Mitterrand et ses sbires ont détruit la moitié de ce qui faisait la France. Nicolas Sarkozy est en train de finir le sale boulot avec l’aide des disciples du premier. (3)

L’Europe doit être détruite (4)

Et non la France. Sans partager la xénophobie de Caton l’Ancien, nous pourrions ainsi le paraphraser. De même que le tribun avait pressenti la dissolution des valeurs de la Rome républicaine dans l’extension de l’empire, nous voyons aujourd’hui les fondements de notre république méthodiquement dépecés au nom de l’harmonisation européenne. L’euro nous a dépossédés de notre souveraineté monétaire. Le découpage administratif du territoire et sa centralisation qui garantissaient l’égalité sont remis en cause pour laisser la place aux eurorégions. Les services publics sont fragmentés en lots suffisamment rentables pour les opérateurs privés. Les dernières industries sont abandonnées aux plans de dégraissage et de fermeture des oligarques transnationaux. L’Etat doit laisser faire, nous dit-on, car il en va de la concurrence libre et non faussée, clé de voute de la constitution européenne. Voilà ce qu’est l’Europe : le cheval de troie du capitalisme mondialisé, un empire techno-barbare.

Unis dans cette mécanique d’oppression, les partis de droite et de gauche ont trahi la nation en bradant son patrimoine à l’oligarchie mondiale. Le dernier espoir de démentir le titre de cet article est de prendre notre propre destin en main comme le firent nos ancêtres en 1789, de converger par milliers, par millions devant nos représentants élus et de ne plus arrêter ce mouvement jusqu’à ce qu’ils prennent les mesures légales pour faire respecter nos droits constitutionnels.

Pierre Delvaux   -    Le 11 avril 2009

NOTES :

(1) : Romulus Augustule : dernier empereur de l’empire romain d’occident déposé par le roi des Hérules Odoacre en 476

(2) :  http://.viabloga.com/news/gouvernance-guerre-ou-nation

(3) :  Dominique Strauss-Khan, qui est en train de supplanter Ségolène Royal dans les cercles politico-médiatiques, ne manqua pas de se réjouir de ce G 20 en précisant : « le problème principal aujourd’hui, ce n’est pas d’augmenter les plans de relance » car en 2009 « le résultat est presque à la hauteur de ce que le FMI avait demandé en février : une relance équivalente à environ 2°/° du PIB ». Pour 2010 « l’important est que les Etats aient déclaré être prêts à en faire davantage si cela s’avérait nécessaire ». Ici, le satisfecit à Nicolas Sarkozy s’agrémente d’une invitation à tenir serrés les cordons de la bourse. D’autant que si on venait à lui succéder, mieux vaut que les caisses de l’Etat ne soient pas complètement vides…

(4) : Rappelons que le consul romain Caton dit « l’ancien » ou « le censeur », défenseur obsessionnel des valeurs de la Rome républicaine et opposé aux influences importées par l’extension de l’empire, concluait tous ses discours au sénat par la célèbre phrase : « Carthage doit être détruite ! » (« Carthago delenda est » ou, selon d’autres sources : « Ceterum censeo Carthaginem delendam esse » : « En outre, je pense que Carthage est à détruire »)

Articles portant sur des thèmes similaires :


Partager cet article


Commentaires

par regis le Jeudi 16/04/2009 à 02:37

« Nicolas Sarkozy scelle la fin de la France ». Pardonnez-moi, ce titre m’agace. Dommage car le contenu lui est bien supérieur. La « France » ce peut être celle des Bonaparte, de  Thiers , de l’Union Sacrée, Vichy etc.…mais elle peut être celle de 1789-1793, de 1830, 1848, de la Commune, de 1936, de 1945, de 1968 etc.… 

Longtemps, je me suis voulu « internationaliste », entendez par là bêtement apatride. C’était idiot. Les nations sont une réalité historique qui ne sera pas forcément indépassable. Mais actuellement le cadre dans lequel on peut agir pour la souveraineté populaire. Parler comme d’aucuns d’« une autre Europe » c’est se soumettre à des institutions dirigées contre les peuples. Ce que vous précisez fort bien.


Re: par Pierre Delvaux le Jeudi 16/04/2009 à 19:24

Voilà, Régis, une excellente occasion de répondre sur un point qui fait utilement débat (chez quelques uns comme nous seulement car c'est un sujet tabou dans le landernau politico-médiatique). Je le savais bien en écrivant mon article, évoquer "la France" en fait frémir plus d'un. C'est quelque chose que je faisais enfant et que je me remets à faire aujourd'hui assez naturellement. Je le faisais moins souvent dans mes années d'apprentissage politique à l'ombre du marxisme. Et je pense que j'avais tort. L'évolution historique actuelle prouve que ceux qui, comme nous, prétendaient vaincre le capitalisme ont eu tort de rejeter la nation, peut-être même la patrie au profit d'un internationalisme théoriquement légitime mais n'ayant, de fait, jamais eu d'existence conséquente (dans tous les cas, pas conséquente face aux forces capitalistes). Il en va de l'internationalisme comme d'autres concepts dans l'histoire du mouvement ouvrier. La plupart de ceux qui ont voulu le mettre en pratique, l'ont fait au mépris de la réalité historique et de la réalité humaine. Les peuples dont on disait vouloir faire le bonheur ont payé très cher cet orgueil intellectuel, d'autant que, souvent, les promoteurs du socialisme internationaliste s'autorisaient à mettre la démocratie entre parenthèse, sûrs que la recette apprise dans les livres allait marcher dans la réalité et qu'alors, on ne leur tiendrait pas rigueur de mesures transitoires désagréables. Il importe de tirer aujourd'hui les leçons du xxe siècle. Je ne renie pas Marx ni, même, Lénine. Ils nous seront encore utiles. Mais les drames passés nous ont, je crois, appris qu'aucune théorie politique aussi subtile soit-elle, ne peut être appliquée unilatéralement à la manière d'un positivisme forcené. Une autre erreur, souvent commise, est de voir une théorie comme la nouvelle et supérieure recette qui va remplacer toutes les précédentes. C'est aujourd'hui le cas avec le développement durable et les idées "alter". En l'occurence, je trouve le corpus un peu mince... Pour autant, je ne rejette pas entièrement tout ce qui nous vient du mouvement écologiste. En fait, je crois avoir appris qu'une bonne pratique politique demande un minimum d'humilité. Humilité devant les théories politiques dont nous ne nous réclamons pas nous-mêmes et que nous avons tout intérêt à comprendre, humilité devant l'Histoire qui forge les êtres humains, leurs sociétés, leurs institutions avec toute leur fragilité et, bien évidemment humilité et respect devant ces êtres humains qui nous entourent avec chacun leur histoire et leurs contradictions. La France est un de ces ensembles qui nous constitue qu'on le veuille ou non. J'ai la faiblesse d'être attaché à ce territoire, à ses habitants, à son histoire des plus contrastées et dont on ne saurait rien retrancher. Et, que cela plaise ou non à Lénine, la notion de patrie ne me semble pas totalement incongrue ni contradictoire avec celles de fraternité et d'internationalisme. Face au capitalisme mondialisé autant qu'au socialisme totalitaire, je crois, effectivement, que nous pouvons trouver notre salut dans la communauté d'histoire et de valeurs qui unit les Français.

Amicalement.

Pierre Delvaux



Archives par mois


La Sociale

Il Quarto Stato